Jobic Le Masson est pianiste. Et alors ? vous entends-je. Alors il est aussi compositeur. Bon ! Une histoire à lui seul. Une histoire qui a quelque chose à voir avec les 7 Lézards. Il n’est pas question de flemmarder mais de se souvenir de ces clubs de jazz dans lesquels il était possible d’expérimenter, de créer sans craindre une quelconque sanction d’un public tout acquis à la cause de la découverte. Le pianiste en a pleinement profité pour se créer un style. Entre toutes les mémoires du jazz, toutes les histoires qui se rejoignent dans ses compositions et improvisations. Un vrai champ jazzistique – pour utiliser la formule de Alexandre Pierrepont.

Pour cet album, « Song » – il mérite bien son nom, sur la plupart des compositions il serait loisible de mettre des paroles – son trio permet de retrouver John Betsch, longtemps compagnon de route de Steve Lacy, additionné d’un contrebassiste, Peter Giron – actuellement enseignant à Paris – pour une musique qui vacille entre toutes les références, Mal Waldron, l’Art Ensemble of Chicago sans parler de Monk ou de Cecil Taylor sans parler bien sur de Steve Lacy lui-même par l’adjonction d’un Steve Potts au plus haut de sa forme qui nous fait regretter de ne pas l’entendre davantage.

Jazz : Jobic Le Masson
Jazz : Jobic Le Masson

Plusieurs retours se fêtent – oui c’est une fête – dans cet album. Steve Lacy que personne ne peut oublier, Jobic lui-même dont les albums se faisaient rare, John Betsch, un de ces grands batteurs que les producteurs devraient solliciter et Steve Potts. Personne ne peut ignorer que les deux Steve –Lacy et Potts – ont souvent conversé dans des albums qui restent et font la joie des amateurs. Potts n’a rien perdu ni de sa sonorité ni de son histoire. Jobic se souvient aussi que Steve Lacy et Mal Waldron se sont produits en duo au Dreher. Toutes ces histoires se mêlent et s’entremêlent pour créer une sorte de communication entre les générations. Jobic né en 1968 et Steve Potts qui se fait connaître en 1968 forgent un présent commun.

Une musique de notre temps qui n’ignore rien de son passé mais sans regarder en arrière pour construire des mémoires et ouvrir le champ des possibles. Lumineux, léger cet album sera un des grands albums de l’année à venir. Bonne année 2017.

Nicolas Béniès.

« Song », Jobic Le Masson trio + Steve Potts, Enja Records, L’autre distribution.


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