Jim Snidero, saxophoniste alto – un instrument qui fut du cirque en son jeune âge -, s’est décidé à former un trio sans piano. C’est rare pour un altiste et c’est une première pour Snidero. Sonny Rollins, Joe Henderson et d’autres ténors nous y avaient habitué, mais pas les altistes. Pour cette première tentative, il s’est appuyé sur les standards, ces épaves de la culture américaine et mondiale qu’il faut, comme Sisyphe avec son rocher, reconstruire à chaque fois.

« For all we know » – pour tout ce que nous connaissons – est le titre qu’il fallait. Se promener dans ces compositions connues – surtout par le jazz – permet tous les écarts, toutes les transgressions pour mieux rendre compte de leur éternité. L’alliage tradition et modernité que permet l’improvisation sans la limite du piano, et la sonorité reposée de l’alto sans l’expressionnisme parkérien ou coltranien, comme un Albert Ayler qui aurait trouve une paix précaire dans un monde dépassé par sa propre violence. Le choix même des thèmes exprime la résistance face aux explosions qui sont notre lot quotidien. Les trois compères – Peter Washington, basse, Joe Farnsworth, batterie – se passent le témoin, lancent des idées pour construire un univers spécifique. La reprise de « Naïma », une des grandes compositions de Coltrane, signe une réussite d’un trio promis à un bel avenir.

Nicolas Béniès

« For all we know », Jim Snidero trio, Savant Records distribué par Socadisc.


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