«We blew it» n’est ni un documentaire sur l’Amérique des années soixante-soixante dix, ni un essai sur le nouvel Hollywood du point de vue de ses vétérans.

Avec ce film qui multiplie les rencontres et les entretiens et qui développe des avis et analyses contrastés, Jean-Baptiste Thoret tente de répondre à la question de savoir pourquoi les deux décennies en question, continuent d’exercer un tel pouvoir de séduction.

Toutes appartenances d’opinions confondues, les personnes interrogées reconnaissent que des révélations artistiques, que ce soit dans le domaine de la musique ou dans celui du cinéma ont non seulement marqué cette époque, mais également laissé des traces indélébiles.

Cinéma : We blew it
Cinéma : We blew it

La bonne idée du film est de l’avoir tourné au cours de la période houleuse de la dernière campagne électorale aux États-Unis.

Ce contexte et l’issue qu’on connaît de l’épisode, donnent un relief particulier à des témoignages et prises de position qui viennent avec un fond de nostalgie, en total contraste avec ce début du vingt et unième siècle inquiétant.

D’où vient cette nostalgie qui teinte le film sur toutes sa durée ? Comment peut-on, dans une Amérique qui était sur le point d’élire Trump, citer comme film culte «Easy Rider » ou comme musiques les tubes de « Creedence» ou des « Stones ».

Ou alors, le cinéma et la musique seraient-ils des secteurs à ce point dépolitisés qu’ils pourraient s’accommoder de toutes les politiques qui pourraient survenir ?

Jean-Baptiste Thoret a sillonné le États-Unis pendant toute cette période de la campagne électorale.

Il nous livre certaines rencontres qu’il a faites au cours de ce voyage représentant une Amérique qu’il qualifie d’« étrange et non répertoriée».

A Seligman, Azizona, Angel Delgadillo, 89 ans, revient sur ce jour où «le monde nous a oubliés» quand il a vu sa petite bourgade soudain désertée à la suite de la construction d’une autoroute et que la route 66 qui avait vu le retour des GI à la fin de la seconde guerre mondiale, qui était celle fréquentée par les ados rebelles à la Kazan, ou celle empruntée par les hippies, était complètement désaffectée.

A Kingson, une petite bourgade du Tennessee,«headquarter» de Donald Trump. Summer, une mère de famille trentenaire voit ce candidat comme une sorte de messie alors que dans les années soixante, son bulletin de vote se serait porté en faveur de Kennedy. Aujourd’hui, selon elle, ce sont les Clinton et Obama qui sont devenus conservateurs….

A Dunsmuir, dans le nord de la Californie, Brad la soixantaine qui tient une boutique d’articles pour chiens, laisse sa radio diffuser les Stones et voue un souvenir ému à ce qu’il appelle la période «Rock’n Roll, sex and drugs». Mais malgré ses préférences anciennes, il s’apprête à voter Trump et il se réfère à Dennis Hopper qui fut une de ses références, appartint à la mouvance démocrate dans les années 70, fut républicain en 2000 et pro Obama en 2008.

Des milliers de miles parcourus, des centaines de petites villes et une trentaine d’états traversés…

Jean-Baptiste Thoret a vu des drapeaux, des autocollants pro-Trump, des fanions «make América Great again» dans les jardins, des pancartes pro Sanders mais aucun signe en faveur d’Hillary Clinton.

«We blew it» est une roadmovie.

Les déclarations des uns et des autres ne sont pas systématiquement filmées face camera.

Souvent, les interventions en voix en off, viennent sur des paysages, banlieues de villes, et campagnes sans beauté et ces défilés d’images distillent par leur caractère ingrat, un grain grossier, une sorte de désespoir qui reflète peut-être la nostalgie que les américains ont pour les années 60-70.

Un beau témoignage frontal.

Francis Dubois


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