Bertrand Tavernier est, outre le grand réalisateur qu’on sait, un homme qui s’est souvent engagé pour défendre le 7ème art, un fin connaisseur du cinéma mondial avec, sans doute, une petite préférence pour le cinéma français qui l’a nourri, très jeune.

Lorsque ce cinéphile de haute volée est venu au cinéma, ce fut au sortir de l’adolescence pour hanter les salles obscures, fréquenter les cinémathèques mais également pour sauver de la destruction à des fins industrielles, des centaines de rouleaux de pellicules parmi lesquels des pépites qui seraient à ce jour, sans lui et quelques autres, définitivement perdues.

Cinéma : voyageà travers le cinéma français
Cinéma : voyageà travers le cinéma français

Alors qu’il se retrouvait en sanatorium pour guérir d’une primo infection, il est, bien que très jeune, fasciné par les images d’un film dont il devait découvrir plus tard que c’était une réalisation mineure de Jean Becker.

C’est sans doute la raison pour laquelle il ouvre « Voyage à travers la cinéma français  » avec ce cinéaste à qui il voue une admiration totale. Des extraits de «  Casque d’or « , du «  Rendez-vous de M ille t » de «  Touchez pas au grisbi  » et de bien d’autres, commentés par lui-même, ont pour effet immédiat l’envie de revoir tous ces films toutes affaires cessantes.

«  Touchez pas au grisbi  » fait le lien avec le second volet du film qu’il consacre à Jean Gabin et la fascination que Bertrand Tavernier a pour le comédien est communicative; et il devient difficile, après autant d’éloges, de ne pas partager son admiration et de faire la moindre réserve à propos des excès de jeu qu’on a pu parfois reprocher au comédien.

Jean Renoir prend la suite du film. L’admiration de Tavernier pour ce cinéaste ne l’empêche pas de revenir sur des positions très contestables qu’il prit en 1940 et sur le fait qu’il opta pour la nationalité américaine. Il rappelle que Jean Gabin disait de Jean Renoir : « C’est un grand artiste mais c’est une pute ».

Le film s’attarde sur la carrière de Marcel Carné mais avant de citer les chefs d’œuvre qu’on doit au cinéaste, il revient sur les dernières réalisations et sur une œuvre mineure, «  Les assassins de l’ordre »

Il rend hommage à des réalisateurs de second plan comme Jean Sacha ou Edmond T Greville et au comédien Eddie Constantine qui, après avoir interprété l’invincible Lemmy Caution, s’est retrouvé, en fin de carrière chez JL Godard et chez Fassbinder….

Puis, Bertrand Tavernier devient attaché de presse ; il travaille sur «  Adieu Philippines  » de Jacques Rosier ou « Cléo de 5 à 7 » d’Agnès Varda mais cette activité ne sera qu’une parenthèse dans son approche du métier.

Il rencontre Jean-Pierre Melville qui lui propose un poste d’assistant sur «  Léon Morin prêtre ».

Jean-Pierre Melville occupe une large part de  » Voyage à travers le cinéma français  » ainsi que plus tard Claude Sautet, deux cinéastes qui lui ont mis le pied à l’étrier et qu’il considère comme ses deux parents de cinéma. Claude Sautet qui supervisera amicalement tous ses films jusqu’ à «  Capitaine Conan  » qu’il jugera à ce point abouti qu’il lui recommandera de ne pas changer une seule image.

Il consacre, dans son film, une large part aux compositeurs de musique que sont Van Parys, Duhamel, Viener ou Kosma.

Mis à part «  Pierrot le fou  » de Godard qu’il considère comme un chef d’œuvre, il ne fait pas grand cas de la nouvelle vague et pour parler de Chabrol, il cite un de ses films mineurs «  L’œil du malin » dont la particularité de n’avoir fait aucune entrée le jour de sa sortie en salle d’exclusivité.

« Voyage à travers le cinéma français  » est une magnifique traversée cinématographique en bonne compagnie à la fois ludique et passionnante, drôle et nostalgique mais toujours tellement enthousiaste qu’elle donne envie de revoir tous les films qui y sont cités.

Le film de Tavernier est à la fois une rétrospective savante et une invitation au cinéma…

Superbe;

Francis Dubois


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