Pendant huit ans, de 2001 à 2009, Judith Abitbol est allée filmer une octogénaire, Ede Bartolozzi, dans son village en Italie.

Huit années au fil desquelles une lente détérioration physique et mentale a doucement diminué une vielle femme joyeuse, gourmande de la vie et qui a su garder, tout au long et presque jusqu’à la fin, dans l’œil, cette même lueur de tendresse et de malice mêlées qui la caractérisait.

Face à Ede, sa fille Paula, la voyageuse comme l’appelle la vieille dame, puisque ses activités professionnelles l’obligent à de constants déplacements un peu partout dans le monde.

Entre deux missions à l’étranger, Paula revient au village et à chaque fois, avec la même joie, la même force, la même intensité, explose la relation fusionnelle entre la mère et la fille. Elles se retrouvent totalement et ce sont de constantes étreintes, de constantes caresses et la vie villageoise se recolore pour la vieille dame.

Elles ne forcent rien, n’inventent rien. Elles se contentent du moment qui se présente mais la moindre des situations prend, dès lors qu’elles la vivent ensemble, une dimension amoureuse.

Qu’ensemble, elles rembobinent des pelotes de laine, conversent avec le voisinage, échangent des souvenirs, elles confirment cet attachement mutuel qui ne date pas d’aujourd’hui et n’a jamais faibli.

De la part d’Ede, c’est un élan permanent et de la part de Paula plus que que du dévouement filial, une sorte de réflexe d’attachement.

Cinéma : Vivere
Cinéma : Vivere

Judith Abitbol filme avec amour cette histoire d’amour entre une mère et sa fille. Elle le fait d’une caméra d’autant plus tendre qu’elle privilégie les petits moments de la vie dans toute leur simplicité.

Ede est amoureuse de la vie, des gens qui l’entourent, des objets, de la musique et cet enthousiasme permanent lui permet de garder un regard rêveur et lucide et d’entretenir son besoin constant de contacts physiques, de gestes tendres….

« Vivere  » n’est surtout pas une chronique sur le vieillissement et la maladie. C’est un regard juste, sans complaisance sur la beauté des êtres aimants, sur l’amour et sur la vie.

On pourra reprocher au film de Judith Abitbol de multiplier les manifestations de tendresse, les étreintes, les accolades, les caresses. D’en arriver au constat d’un étouffement à force d’aimer ; car rien n’est dit sur l’histoire personnelle de Paula, sur sa vie en dehors des visites à sa mère.

Mais on ne se lassera jamais de lire sur le visage des deux femmes le plaisir d’être réunies…

Et lorsque la maladie prend le dessus, que le vieille dame a des comportements désordonnés, que le temps et les souvenirs lui échappent, il reste l’essentiel : les élans vers les autres, les gestes amicaux, le bonheur d’être en vie.

Conçu à partir de huit années de rushes, «  Vivere  » a dû nécessiter un gros travail de montage. Un autre choix des séquences à retenir aurait peut-être donné lieu à une autre tonalité narrative.

Le choix pour lequel a opté Judith Abitbol débouche sur une œuvre magnifique, sensible, cruelle, rare, qu’on aimerait savoir universelle…

Francis Dubois


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