Le 22 juillet 2011, l’explosion d’une bombe à proximité du siège de gouvernement à Oslo se solde par la mort de huit personnes.
Deux heures plus tard une attaque se produit sur l’île d’Utoya où se tient un rassemblement de la Ligue des Jeunes Travaillistes regroupant environ cinq cents personnes.
Un tireur armé déguisé en policier a ouvert le feu sur les campeurs, abattant soixante neuf jeunes gens et en blessant trente trois.
L’auteur des tirs est un militant d’extrême droite qui revendique les deux attentats.
«Utoya» a été écrit à partir des témoignages et de rapports de police mais, par égard pour les victimes et leurs familles, les personnages et les expériences individuelles relèvent de la pure fiction.
On ne peut, à la lecture du pitch, ne pas penser à « Eléphant » le film de Gus Van Sant qui faisait référence au massacre de Columbine au cours duquel treize élèves d’un lycée ont péri sous les balles d’un tireur fou.
Or, s i «Utoya» et le film de Gus Van Sant, décrivent deux massacres similaires, le film d’Erik Poppe se démarque d’ « Eléphant » par son parti pris de décrire l’histoire du point de vue des jeunes, des victimes et non du terroriste alors que le choix de Gus van Sant était d’alterner des séquences du tueur et celles des jeunes victimes.
Erik Poppe voulait suivre quelques uns de jeunes participants au rassemblement et essayer de capter au plus près et en temps réel, les soixante douze minutes terribles qu’ils ont vécues depuis les débuts des tirs jusqu’à l’arrivée des premiers secours.
Le film d’Eric Poppe est beaucoup plus scénarisé que celui de Gus Van Sant. Peut-être l’est-il trop au point parfois de prendre de la distance avec l’arrière plan politique qu’Erik Poppe semblait avoir voulu traiter en filigrane.
Le film résiste-t-il à une sorte de romanesque qui «charge un peu trop la barque »avec un déroulement du récit haletant quand il privilégie un personnage central qui vire très vite à l’héroïne ? Sans compter la tournure d’un récit qui s’apparente, même si c’est de très loin, à un thriller.
Erik Poppe en faisant le choix narratif de privilégier la fiction rend le film sans doute plus attractif, moins abstrait.
Les personnages annexes qui s’invitent : la sœur, l’amoureux, le garçonnet au ciré jaune, apportent chacun de nouveaux éléments au drame et entraînent le récit du côté du mélo.
Le tournant dramatique apporte-t-il force à cette tuerie aveugle ou bien, au contraire le recours à l’anecdote affaiblit-il le propos ?
Francis Dubois
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