Une femme a-t-elle le droit d’être assez libre pour bousculer les règles de la bonne mesure en amour, de vivre sa sexualité selon ses désirs et sans retenue ?
L’Angélique de Paul Vecchiali a mené une vie sexuelle débridée, elle a rarement résisté à un inconnu attirant et à la promesse du plaisir.
Aujourd’hui, après un deuil douloureux, elle est à l’heure délicate des bilans.
Au cours de voyages en train, elle va être amenée à rendre des comptes à des voisins de banquette très différents : sa meilleure amie, son mari, ses beaux-parents, un être farfelu, un dragueur invétéré, un séducteur et une troublante dame en noir.
Et si la mort de celui qu’Angélique a aimé au milieu d’un désordre de rencontres et de moments de plaisir e été une terrible épreuve, la vie n’en continue par moins son cheminement….
Le spectateur du film de Paul Vecchiali a pris place, pour des laps de temps variables, face à la voyageuse Angélique et à ses compagnons de voyage.
Pas une seule fois, elle ne s’absentera de l’image et d’une fois à l’autre, alanguie dans ses pensées, elle sera dans l’attente de son prochain interlocuteur.
Il faut beaucoup d’audace (mais plus prosaïquement, Paul Vecchiali parle de contraintes budgétaires) pour coincer le spectateur dans un rapport frontal et statique face à des personnages qui parlent.
Beaucoup d’audace mais sans doute aussi beaucoup d’amour pour ses personnages.
Car tout le cinéma de Paul Vecchiali est là. Il est dans le sujet qu’il aborde, souvent de façon frontale, sans précautions et circonvolutions mais il est aussi dans sa tendresse pour ses personnages et peut-être plus encore dans sa fidélité aux acteurs qu’il a convoqués pour les interpréter.
La liberté sexuelle qu’a toujours vécue Angélique et qu’elle revendique, se dit sans détours à travers des propos souvent crus où on appelle un chat, un chat et un sexe, un sexe. Cette liberté, cette façon de revendiquer le droit au plaisir charnel fait d’Angélique l’héritière de tout le cinéma de Paul Vecchiali même quand il traite d’autres sujets et de façon moins sulfureuse.
Et Astrid Adverbe, la nouvelle égérie du réalisateur qui l’interprète n’est pas loin de faire penser à toutes les comédiennes qui ont tourné dans ses films.
N’est-elle est à la fois un peu Danielle Darrieux de «En haut des marches», Hélène Surgère de «Corps à coeur» , Sonia Savange de « Femmes femmes» , Myriam Mézières de « Change pas de main » , Fabienne Babe….et une sorte de voisine de toutes les femmes qui ont hanté et qui hantent le cinéma vecchialien….
Et ce qui, dans « Trains de vie » fera mouche auprès des fidèles des films de Paul Vecchiali c’est d’y retrouver parmi les voisins de voyage d’Angélique, des comédiens fidèles au cinéaste comme Marianne Basler qu’il révéla dans «Rosa la Rose » en 1986, Brigitte Rouan du « Le café du Jules » ou Pascal Cervo qu’on a souvent vu dans des réalisations issues de «Diagonale», la maison de production liée à Paul Vecchiali depuis des décennies,
A quatre-vingt-sept ans, le réalisateur a repris avec la même vigueur, la même poésie, son baluchon de faiseur d’images ; il a réalisé dans le même temps, « Les 7 déserteurs» qu’il dédie à Jean-Luc Godard, Raymond Bernard et Samuel Fuller.
On ressort de «Train de vie», ému, bouleversé, un peu nostalgique, sur un petit nuage de cinéma….
Francis Dubois
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