Lorsqu’il débarque en Algérie, dans la petite ville de Timgad, Jamel un jeune archéologue d’origine algérienne ne sait pas encore que sa seule mission ne sera pas d’effectuer des fouilles dans les ruines romaines du site.
Si le passé s’offre à lui, les circonstances du moment vont l’amener à devenir l’entraîneur de la jeune équipe de foot locale, « la Juventus de Timgad ».
Tous issus de familles modestes, les gamins qui la constituent n’ont ni maillots, ni chaussures de foot mais « dribblent » avec talent.
Entre vestiges antiques et plaies récentes, Jamel découvre les racines profondément ancrées et les espoirs modestes d’une Algérie qui se rêve réconciliée et…championne de foot.
Fabrice Benchaouche a réalisé une franche comédie avec en toile de fond un état des lieux de l’Algérie d’aujourd’hui en mettant en scène les personnages-phares d’un village où les rumeurs et les petites trahisons vont bon train : l’instituteur bon bougre, bougon plutôt jaloux du prestige de sa fonction, l’épicier dont la boutique est le point névralgique de l’agglomération ou la jeune veuve séduisante, mère d’un des piliers de l’équipe à qui on va très vite reprocher de nourrir une trop grande sympathie pour l’archéologue.
La peinture de ce microcosme villageois est savoureuse même si les comédiens qui interprètent l’instituteur et l’épicier sur-jouent et lorgnent du côté de la caricature;
Mais nous sommes dans le domaine de la franche comédie et les débordements de jeux s’intègrent très vite à la coloration bon-enfant du récit.
Le film de Fabrice Benchaouche n’est pas seulement une chronique villageoise et l’histoire d’une équipe de foot en rivalité avec celle de la ville voisine.
C’est aussi, en filigrane, un regard sur l’Algérie actuelle, sur les difficultés économiques qui touchent surtout les couches de la population du bas de l’échelle sociale, une Algérie où, quand l’instituteur demande à l’épicier de sponsoriser l’équipe de foot, il ne s’agit pas de l’assister financièrement, mais de fournir des boissons gazeuses.
C’est également un regard sur les mentalités, sur le rôle de la femme cantonnée à des tâches ménagères, sur l’impossibilité d’intégrer une fille pourtant douée pour le foot à une équipe de garçons.
Une des qualités du film de Fabrice Benchaouche est d’avoir su intégrer dans le processus de la comédie, des problèmes sociaux sans en réduire la portée. Et d’avoir su mêler intimement, le grotesque et le dramatique; ainsi les chaussures de foot obtenues à la suite d’un concours de circonstances tenant du miracle, qui sont mangées par des chèvres affamées.
La comédie à l’algérienne n’est pas loin de s’apparenter à la comédie italienne et si celle-ci est parfois maladroite, elle se relève de ses faiblesses grâce à la bonne humeur générale, à son absence de prétentions quand elle ne vise qu’à être un divertissement teinté d’actualité.
Pari tenu.
Francis Dubois
Des militants partagent ici des critiques littéraires, musicales, cinématographiques ou encore des échos des dernières expositions mais aussi des informations sur les mobilisations des professionnels du secteur artistique.
Des remarques, des suggestions ? Contactez nous à culture@snes.edu