Une première scène, énigmatique et intrigante, dans la forêt norvégienne donne sa tonalité au film, même si on ne la comprend pas immédiatement : un chasseur accompagné d’une fillette, avant d’avoir hésité à tirer sur une biche, dirige le canon de son fusil sur l’enfant.

Suit l’arrivée à Oslo d’une jeune fille timide et réservée venue y suivre ses études.

Surveillée à distance par ses parents, elle va néanmoins découvrir sa sexualité et céder à l’attirance amoureuse qu’elle éprouve pour Anja, une charismatique camarade de la faculté.

Cette attirance va bafouer toutes les forces de l’éducation religieuse et stricte qu’elle avait reçue et qui l’avait jusque là, tenue à distance de toute tentation coupable.

Bien que les références soient multiples, nordiques («  Breaking the waves  » de Lars von Trier et les films de Dreyer) ou latines («  Carrie » de Brian de Palma et les gialli de Dario Argento), Joachim Trier dont c’est le premier essai dans le film de genre, les assume et parvient à les transcender pour les mettre au service de son propos.

Tout dans son film, joue sur le contre emploi.

Oslo est filmée d’une façon claustrophobique, les grandes étendues de neige et de glace du nord de la Norvège sont source d’inquiétude et la maison où Thelma a grandi et où son père essaiera d’extirper le « mal » qui est en elle devient, à mesure que le film se déroule, un espace étouffant.

Mais Thelma en parvenant à se réconcilier avec ses proches, pourra se libérer du poids d’un passé qui aura cadenassé ses élans et se sentir autorisée à vivre enfin sa vie.

Cinéma : Thelma
Cinéma : Thelma

Le film de Joachim Trier peut être vu à la fois comme un récit d’apprentissage qui renvoie au personnage du frère cadet de « Back home  » ou à la mélancolie de la solitude dans «  Oslo, 31 août « , ses deux réalisations précédentes.

« Thelma » est un « récit gigogne » qui joue sur plusieurs périodes de la vie de son personnage, chacune portant un éclairage nouveau sur un passé aux multiples facettes.

Les récits d’apprentissage sont, par définition enflammés mais ici, le poids de la culpabilité cadenasse les élans et c’est ce muselage des sentiments, une réaction à la répression morale qui génèrent les phénomènes paranormaux qui se multiplient autour de la jeune fille.

Un film passionnant à la fois brûlant et glacial.

Francis Dubois


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