Auditeur international, Alain Delage débarque dans une petite république autoproclamée du Caucase, le Haut-Karabakh, pour y réaliser un audit qui permettrait, s’il était concluant, d’envisager l’ouverture de son aéroport. Celui-ci est déjà construit, flambant neuf ; le personnel se présente quotidiennement mais reste au sol en attendant l’ hypothétique autorisation de reprise du trafic. Au contact des habitants et d’un mystérieux enfant porteur d’eau, Alain Delage découvre un monde dont il ignorait l’existence et au moment de finaliser sa mission, risque le tout pour le tout.

Nora Martirosyan était étudiante en Arménie quand la guerre du Haut-Karabakh a éclaté.

Le Haut-Karabakh est un territoire qui « n’existe pas » sur un plan géographique et juridique, qui a pourtant une capitale, un président et une constitution. Nora Martrosyan a réalisé pendant dix ans des allers-retours entre la France et ce petit pays pour trouver à écrire une histoire possible qui se situerait dans cette enclave et en révélerait l’étrangeté.

Elle a été très intriguée au premier chef par l’aéroport, un édifice à l’architecture moderne qui dispose de tout l’équipement et doté d’un personnel qui s’y présente chaque jour même si l’absence de trafic ne justifie pas sa présence.

Dans « Si le vent tombe » L’aéroport fantôme est devenu le symbole du pays. C’est cet espace et ce curieux non-fonctionnement qui a inspiré la fiction à la réalisatrice. Et c’est principalement l’existence si particulière de cet aéroport en même temps que quelques personnages insolites auxquels elle s’attache qui font basculer le récit dans le fantastique.

Des personnages en attente. Car si enfin l’aéroport pouvait vivre, c’est toute la population qui rentrerait dans la normalité et serait reconnue.

Est-ce de la décision d’Alain Delage que va dépendre l’avenir de cette enclave minuscule, sa reconnaissance enfin ? N’existe-t-il pas d’autre raisons qui freinent l’ouverture de l’aéroport ? Suffirait-il que le vent tombe pour que les avions puissent voler ? La reprise du trafic est-elle liée à des conditions météo favorables. La situation politique du pays, son statut de pays oublié n’en serait-elle pas la cause ?

La force narrative de « Si le vent tombe » tient à l’étrangeté du fonctionnement du pays, l’étrange comportement de certains de ces habitants associé à la présence d’Alain Delage dont le comportement est réglé par le souci de mener à bien sa mission mais sur qui, peu à peu, déteint l’atmosphère particulière à laquelle il devient sensible.

« Si le vent tombe » est un film étrange, à la limite du fantastique, qui nous plonge à la fois dans la réalité d’un pays fantôme et dans tout ce que cette particularité a d’envoûtant.

Chaque spectateur du film est-il un Alain Delage en puissance ?

Grégoire Colin, comédien beaucoup trop absent des écrans, entouré de comédiens arméniens pour la plupart d’entre eux, réussit uns très belle composition.

Francis Dubois

Un film de Nora Martirosyan (France-Arménie-Belgique) – Sortie en salles le 26 mai 2021.

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