A la périphérie de Gaza, dans une zone rurale, la famille Samouni s’apprête à célébrer un mariage.

C’est la première fête familiale depuis la dernière guerre au cours de laquelle Amal, ses frères et ses cousins ont perdu de nombreux membres de leur famille et ont vu détruire leurs maisons et leurs plantations d’oliviers.

Le quartier où ils vivent, qui a été ravagé, est en reconstruction. Les arbres sont replantés, les champs sont à nouveau cultivés mais le plus dur pour les survivants est de reconstruire leur propre mémoire.

« Samouni Road », au fil des souvenirs, dresse le portrait de cette famille avant, pendant et après l’événement qui a marqué leur vie à jamais.

Cinéma : Samouni road
Cinéma : Samouni road

En 2009, Stefano Savona réalise «  Plomb durci  » composé d’images tournées à Gaza durant la guerre menée par l’armée israélienne dans l’enclave palestinienne. Un film qu’il réalisa comme un blog cinématographique au jour le jour, une sorte de chronique quotidienne conçue pendant l’attaque malgré la fermeture des frontières. Son objectif était de rendre compte de la guerre de l’intérieur le plus objectivement possible sans se concentrer sur les cadavres, la douleur et la violence.

C’est au cours de ce tournage, au lendemain du retrait de l’armée israélienne, lorsque le cinéaste a pu rejoindre le nord de la bande et la ville de Gaza, qu’il a rencontré la famille Samouni, communauté de paysans jusque là épargnée pas les années de conflits et d’occupation et confrontée pour la première fois à une tragédie sans précédent qui a vu périr vingt neuf membres de la famille et détruire les habitations et les plantations.

Le film sur ce terrible épisode ne pouvait être un simple compte rendu du massacre ou se limiter au constat du deuil.

Il s’agissait de trouver un autre point de vue et sortir de la position où le récit arriverait juste après le massacre, quand les protagonistes n’existent plus que comme victimes.

Il fallait redonner aux membres de la famille Samouni une existence longue, cesser de les ensevelir tous, survivants et morts, sous le poids de l’événement fatal.

Il n’était donc pas question que le film s’arrête aux images tournées en 2009.

En 2010, Stefano Savona apprenait le mariage d’un jeune couple dans la famille, qui semblait impossible une année auparavant à cause de la mort des pères des deux futurs mariés.

Il est retourné auprès de la famille en dépit du fait qu’il était difficile d’entrer à Gaza et y a séjourné plusieurs semaines.

Les Samouni avaient réussi à remettre en état une partie de leurs champs, à transformer une étendue de décombres en quartier cultivé et verdoyant malgré les difficultés d’un embargo très strict.

Filmer la famille Samouni en 2010 a donné à Stefano Savona l’envie de raconter le quotidien de 2008 en donnant aux membres de la famille la variété et la force de leurs existences d’hommes, de femmes et d’enfants.

Il n’était pas question d’avoir recours à des comédiens pour les interpréter.

C’est alors qu’est venue l’idée de l’animation pour restituer les souvenirs des protagonistes, tous inspirés des récits et des témoignages des Samouni.

Les dessins d’animation étaient là pour faire revivre le quartier et les membres de la famille qui ont péri dans le massacre, pour réinventer tout ce qui a été détruit, les maisons, les mosquées, les vergers, ce paradis perdu qu’évoquent les survivants.

L’actualité de la famille Samouni, le documentaire et les images d’animation qui respectent les ressemblances des personnages font du film de Stefano Savona une œuvre singulière qui donne toute sa dimension dramatique à une situation toujours tragique et douloureuse et toujours aussi préoccupante.

Francis Dubois


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