Rocco Sifredi est une légende vivante dans le domaine de la pornographie.

Il aurait pu devenir prêtre comme le souhaitait sa mère à qui il a voué un amour sans limites, ou modestement cantonnier comme son père.

Mais alors qu’il était encore un enfant, il a passé un pacte avec le diable : si celui-ci l’aidait à devenir un jour célèbre, il le servirait et de toute sa vie, lui serait redevable.

C’est ainsi qu’au lieu d’être curé et de se consacrer au dieu du ciel, il a opté pour un autre dieu auquel il a consacré son existence : le désir.

En trente ans de carrière, celui dont le seul nom évoque le genre pornographique aura visité sans les épuiser tous les fantasmes de l’âme humaine et se sera librement, sans la moindre petite trace d’autocensure, prêté à toutes les transgressions.

Cinéma : Rocco
Cinéma : Rocco

Ce quinquagénaire au physique plutôt passe-partout (sauf en situation de nudité !) a pratiqué le métier de « hardeur » et dans cette voie le plus souvent méconnue du grand public, est parvenu à une notoriété telle que son nom résonne à l’échelle mondiale même auprès de ceux qui restent extérieurs à la pornographie.

Si Rocco Sifredi est parvenu à ce degré de célébrité ce n’est pas seulement pour le goût de l’argent, pour l’ivresse du prestige, c’est essentiellement par son amour du sexe et son addiction au plaisir de l’acte sexuel.

Dans le documentaire de Thierry Demaizière et Alban Teurlai en forme d’introspection et pour lequel il dit avoir tourné la dernière scène pornographique de sa carrière, Rocco Sifredi lève le voile sur un personnage de « séducteur sexuel » qui donne libre cours à ses pulsions au point de raconter qu’après les obsèques de sa mère, une amie de celle-ci l’ayant étreint dans un but de consolation, il n’avait pu, après avoir ressenti une pulsion, réprimer l’élan du désir et qu’il avait fait sur le champ l’amour à la sexagénaire sans lui laisser le temps d’être réfractaire ou consentante.

Cet homme incapable de contrôler son désir est l’époux « fidèle » d’une femme qui a accepté la situation et qui, à l’inverse des femmes trompées, sait toujours où est son mari, en compagnie de qui il est et cela, dans le but de ne faire que son travail.

De son côté il a repoussé autant que possible les règles de la fidélité conjugale et s’il multiplie les étreintes appuyées avec les jeunes femmes ou les actes sexuels avec les actrices, il le fait dans un état d’esprit tel qu’il affirme n’enfreindre jamais la règle.

On le voit, de la même façon, questionner ses deux fils, jeunes gens d’une vingtaine d’années, sur la façon dont ils perçoivent le métier de leur père.

« Rocco « , en dehors de l’approche du personnage du célèbre « hardeur », ouvre sur l’univers de la fabrication des films pornographiques, sur les motivations des filles qui se prêtent à ces tournages particuliers, réalisés à la hâte, en dehors de tout respect de la plus élémentaire grammaire cinématographique.

Les scénarii s’écrivent à la hâte dans une pauvreté créatrice consternante et les tournages sans équipe se font avec, maniant la caméra, un chef opérateur (le cousin de Rocco) qui n’a aucune notion de la prise de vue.

Ce n’est pas le cas du film de Thierry Demaizière et Alban Teurlai qui en dehors de la qualité de l’image, d’une certaine recherche esthétique, bénéficie d’une construction aboutie et qui, en dépit des nudités et des scènes pornographiques, grâce au parti-pris de son propos, ne met jamais le spectateur en position de voyeur.

Francis Dubois

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