Reza et Fati ont pris la décision de divorcer. La vie commune a fini par lasser Fati et Reza s’est résigné au choix de son épouse tout en caressant l’idée qu’elle reviendrait un jour ou l’autre sur une décision qui semble ne pas la satisfaire pleinement.

Le divorce « consommé » n’entamera pas l’essentiel de ce qui les avait réunis durant plusieurs années, un attachement l’un à l’autre et une solide complicité.

Reza se résigne d’autant plus facilement à la situation que Fati ne semble pas avoir trouvé dans la séparation une indépendance qui lui convienne et que lui s’est plongé tout entier dans l’écriture d’un ouvrage sur les légendes persanes.

Cinéma : Reza
Cinéma : Reza

Sur cette trame narrative hésitante d’où la psychologie est absente, n’habitant pas plus les personnages que les situations, Alireza Motamedi a construit un édifice un peu inconsistant, qui donne parfois l’impression de progresser à vue, dont l’essentiel réside dans ce qui se passe à la périphérie du sujet.

Si bien qu’on s’interroge sur les motivations profondes de Reza, sur la force de l’amour-passion qui semble le retenir auprès de Fati, sur l’image qu’il donne de l’amoureux transi et patient, sur cette sorte de résignation positive où il se cantonne.

On s’interroge tout autant sur les raisons pour lesquelles Fati a pris la décision de divorcer puisqu’elle ne semble pas se résigner à la séparation et que sa position flottante maintient le couple dans une espèce de situation suspendue à partir de laquelle tout pourrait survenir, aussi bien un retour au couple qu’une rupture assumée ou que le statut quo.

Si l’histoire du couple manque de consistance, des traces d’une ancienne passion à force d’hésitations et de constants aller-retours nonchalants auxquels on ne trouve pas de sens satisfaisant, le film de Alireza Motamedi trouve son souffle dans une construction originale constituée de l’imbrication de « moments » en creux, souvent brefs voire tronqués et qui fonctionnent comme les pièces d’un puzzle.

En attendant que l’histoire se décide à avancer, le film baguenaude et trouve dans des digressions inspirées, souvent savoureuses, quelquefois touchantes, une sorte de mouvement de balancement dont le charme légèrement enivrant finit par suffire à nous contenter, où se loge une espèce de poésie du quotidien ou un réalisme efficace et finement observé.

Le sujet du film pourrait être la situation du couple qu’à la fois trop de choses et trop peu de choses encore en commun gardent proche, mettent dans une situation de porte à faux mais cependant presque confortable dans sa paresse à décider.

Mais le film, et c’est sans doute là qu’il trouve sa force et son originalité, nous amène toujours là où on ne l’attend pas, surprenant, déroutant. Une option fragile mais qui permet au fil narratif de ne jamais se rompre.

L’une des idées principales concernant l’esthétique du film et qui ajoute à l’efficacité de la construction repose sur le contraste entre le tragique de la séparation, la solitude de Reza et les décors luxuriants d’Ispahan.

L’image est chaude et doucement sophistiquée. Les cadrages sont au cordeau et les sons sont doux, constitués de bruits naturels et de chants d’oiseaux qui donnent parfois l’impression que Reza évolue dans une sorte de paradis.

« Reza  » qui est le premier long métrage d’Alireza Motamedi est un regard neuf sur l’Iran d’aujourd’hui et une réflexion discrète sur la séparation du couple.

Francis Dubois


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