Alors qu’ils s’apprêtaient à jouer « La Mouette  » de Tchekov, Serge et Olivia deux comédiens confirmés et vieux complices de la scène qui ont interprété ensemble tous les couples mythiques du répertoire, apprennent qu’ils vont avoir un enfant.

Serge poursuit les répétions alors qu’Olivia doit rester dans l’appartement pour éviter un accident de grossesse.

Tenue à l’écart d’un travail auquel elle s’était préparée avec passion, elle réalise que la frontière est mince entre sa propre vie et le rôle qu’elle devait jouer.

Dès lors une sorte de confusion s’installe entre vivre le jeu théâtral et théâtraliser sa vie.

Il est peut-être important de savoir qu’à l’origine du projet, le film devait être le déroulement d’une journée dans la vie d’une femme et que c’est seulement lorsque la grossesse de la comédienne Olivia Corsini s’est annoncée, que le film a été repensé, réécrit et qu’il est devenu «  Olmo et la mouette »

Cinéma : Olmo et la mouette
Cinéma : Olmo et la mouette

Soustraite au travail collectif auquel elle devait participer, Olivia fait l’expérience douloureuse de la solitude et aborde sa grossesse comme un deuil de soi et pas seulement comme la célébration de la vie.

L’appartement où elle vit isolée devient une sorte de matrice, un lieu où s’opère une double gestation à la fois créatrice et organique.

C’est un peu comme si, dans l’impossibilité de se livrer au jeu créatif, elle allait mettre en scène son état de future mère et le film prend trois formes : celle du documentaire, du journal intime et de l’essai poétique.

Il en est ainsi jusqu’à se poser la question de savoir si «  Olmo et la mouette  » est véritablement une fiction.

Le sujet du film tourne autour du fait que ce couple de comédiens se connait surtout parfaitement dans le domaine artificiel de la représentation.

Ils ont besoin l’un et l’autre, elle parce qu’elle est frustrée du projet, lui parce que le projet l’accapare, du « jouer » leur vie et dès lors, leurs rapports même s’ils sont indiscutablement des rapports amoureux ont besoin de passer par le philtre (l’artifice, la coloration) du jeu.

Tout passe par le philtre du jeu théâtral et les fluctuations d’humeur, le comportement capricieux d’une femme enceinte auxquelles adhère Serge s’y prêtent. L’artifice se mêle à la sincérité et les conflits autant que la complicité vont dans le sens de cette coloration des rapports.

Petra Costa et Léa Glob filment à « fleur de peau » les affrontements, la tendresse, la solitude sur fond de questionnements qui ne cessent de mettre en danger la quiétude des sentiments profonds.

Et si les scènes de conflits, de désaccord résonnent comme une sorte de passage obligé du fonctionnement d’un couple, les scène « d’amour » sont au contraire des moments de plein apaisement.

Les personnes évoluent dans l’artifice du jeu et les personnages dans la sincérité de la vie. Les rapports de cet homme et de cette femme sont captés par une caméra qui sait être partout, au plus proche, au plus intime, au plus secret, sur la peau.

«  Olmo et la mouette  » est le récit sur « l’amour-toujours-difficile » une sorte de combat tendre duquel ne sortirait ni perdant, ni vainqueur.

Le titre dont on ne saisit qu’à posteriori la justesse et la sensibilité, peut prêter à confusion et laisser présager une bluette ou un conte pour enfants.

Il serait dommage que le moindre malentendu vienne priver le public de cette « pépite » !

Francis Dubois


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