Un dîner de gala doit avoir lieu à l’Hôtel Europe de Sarajevo pour la commémoration du centième anniversaire de l’assassinat de l’Archiduc François-Ferdinand.
Mais les employés du prestigieux établissement qui n’ont pas été payés depuis deux mois, lancent un mot d’ordre de grève.
Or, si le dîner est annulé, l’Hôtel Europe déjà hypothéqué, risque la fermeture et son rachat par une banque.
Omer, le responsable de l’hôtel n’a d’autre solution que de faire appel à Enzo, le chef mafieux qui gère un établissement de strip-tease au sous-sol pour neutraliser le représentant du personnel et tenter ainsi de tuer le mouvement social.
Pendant ce temps, des journalistes interviewent des invités de prestige, historiens ou sociologues sur la terrasse de l’établissement pour une émission de télévision, un grand intellectuel français répète le discours d’introduction qu’il doit prononcer et Lamija, chef réceptionniste fait de son mieux pour assurer le bon déroulement de la soirée.
Mais les choses se compliquent lorsque Hatidza, la mère de Lamija, employée à la blanchisserie de l’hôtel est désignée pour être le nouveau meneur de grève…
Surtout que s’est présenté à l’hôtel, un bosnien serbe du même nom que l’assassin de l’Archiduc, Gravilo Princip, dont les opinions pro-serbes sèment un vent de panique chez les journalistes obligés d’interrompre l’ émission…
Le film de Danis Tanovic est librement inspiré de la pièce «Hôtel Europe» de Bernard-Henri Levy dont la première représentation avait eu lieu au Théâtre National de Sarajevo au moment des commémorations du centenaire de la Première Guerre Mondiale.
Et les propos de l’intellectuel français invité sont tirés directement du texte original de Bernard-Henri Levy et joués par Jacques Weber, créateur de la pièce.
En dehors du discours que met au point le personnage dans sa chambre, tout le reste du film est le fruit de l’imagination du metteur en scène-scénariste.
L’ancien hôtel Holiday Inn qui avait été construit pour les Jeux Olympiques de 1984 est un lieu mythique de la ville. C’est de là qu’ont eu lieu les premiers tirs de sniper en 1992 et l’hôtel a servi de QG aux reporters durant le siège de Sarajevo.
«Mort à Sarajevo» a tourné à son avantage les handicaps logistiques d’un tournage dans un lieu unique en utilisant, dans ce qu’ils avaient chacun de singulier, les trois niveaux de l’hôtel, les dédales de ses longs couloirs labyrinthiques des sous-sols.
La terrasse où se déroulent les interviews est un lieu ouvert, plongeant sur la ville, les étages à l’atmosphère feutrée se présentent selon d’interminables couloirs aux éclairages tamisés et les sous-sols où se trouve le cabaret, antre des numéros de strip-tease et quartier général de la mafia bénéficient de lumières rougeoyantes.
Chacun des trois étages sert de cadre à trois histoires séparées. Les employés de l’hôtel créent la connexion entre les différents étages et lient les événements entre eux.
« Mort à Sarajevo » est une histoire très bosniaque, très balkanique sur la période d’une transition qui sévit depuis vingt-cinq ans et dont nul ne sait jusqu’à quand elle va durer.
Le microcosme que représente l’hôtel Europe du film est sans doute une métaphore de l’état actuel du pays même si Danis Tanovic s’en défend.
Les deux générations en présence dans le film ont en commun le souci de survivre. Ils n’ont pas plus à faire du discours de l’intellectuel français que d’assister au concert donné par l’Orchestre Philharmonique de Vienne. L’Art et la culture sont quasi-inexistants en Bosnie.
Une caméra fluide accompagne les personnages. Le construction est magnifique et la mise en scène de Danis Tanovic impressionnante…
Francis Dubois
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