David va bientôt avoir quinze ans. Il sait que son grand père est sur le point de mourir mais il refuse d’aller lui rendre visite à l’hôpital, sans doute pour nier l’échéance.
Le vide que laisse l’aïeul hospitalisé et l’absence dans la maison de sa mère qui passe ses journées à son chevet contraignent David à endosser des responsabilités pour lesquelles il n’est pas prêt.
Cependant les circonstances ne lui laissent pas le choix et il va, sans s’en rendre compte, à son insu, peut-être à la faveur de la plus grande liberté dont il dispose, s’acheminer en très peu de temps vers sa vie d’adulte.
Face à l’événement qui va survenir et qu’il redoute sans doute beaucoup plus qu’il ne le laisse paraître, David, en quelques jours va faire table rase, plus ou moins consciemment, de tout ce qui le relie à son enfance.
En quelques jours, il va tout perdre : sa petite amie avec qui il entretenait une relation très enfantine, ce qui faisait sa relation avec sa mère, son meilleur ami, son année scolaire qui va se solder par un redoublement et ce grand père dont on ne saura jamais s’il avait avec lui une relation forte.
Et c’est seulement, lorsqu’il aura désertifié son univers d’enfant qu’il sera prêt à affronter la réalité et qu’il fera son entrée dans le prochain épisode de sa vie de grand adolescent.
Joao Salaviza s’en tient tout au long de son récit au seul personnage de David. Et si, apparaissent de façon épisodique celui de Paulinha, la petite amie, celui de Monica, la mère et celui de Rafael, l’ami de toujours, ils ne sont là que pour mettre l’accent sur la solitude de David, que pour faire place nette autour de lui et préparer le terrain neutre qui sera son terrain d’envol.
La mise en scène sobre et rigoureuse, réduit jusqu’aux limites du possible les événements qui devraient être saillants.
On ne verra jamais le grand père agonisant sur son lit d’hôpital. Le vol du scooter gardera tout son mystère et l’interlocuteur, représentant de l’administration du collège, interroge l’adolescent hors champ sur les raisons de son comportement et son refus de l’école.
On ne verra rien des rues de la ville de Lisbonne et la capitale sera réduite aux endroits que fréquentent les adolescents en rupture de famille ou livrés à eux-mêmes.
Chez Joao Salaviza même les moments du récit chargés de symbole passent presqu’inaperçus. Dans les dernières séquences, après une nuit passée avec sa copine, une dispute violente avec son ami, la destruction du scooter, David de retour chez lui aura changé.
C’est lui, alors qu’il vient de rallumer un mégot, qui va décrocher le téléphone et recevoir le coup de fil de l’hôpital. Il sera capable de laisser un temps de répit à sa mère avant de lui annoncer la mauvaise nouvelle.
Un récit d’une grande sobriété où l’émotion n’est jamais bien loin.
Francis Dubois
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