Ratna est domestique chez Ashwin, le fils d’une riche famille de Bombay. Après une rupture amoureuse, le jeune homme a réintégré la maison familiale qu’il occupe seul.

En apparence Ashwin semble tout posséder pour être heureux mais Ratna détecte chez lui, les signes d’une lassitude et découvre bientôt qu’il a renoncé à tous ses projets.

Face à lui qui a tout, Ratna ne possède rien d’autre que ses espoirs de devenir un jour styliste de mode, un projet fou mais en quoi elle met pourtant toute sa détermination.

Deux mondes que tout différencie vont cependant cohabiter, se découvrir, s’effleurer….

Cinéma : Monsieur
Cinéma : Monsieur

En Inde, la façon dont les familles aisées traitent leurs domestiques est inavouable. Même les individus les plus évolués et progressistes pratiquent une hiérarchie très définie obéissant à des normes sociales solidement enracinées.

La fracture des classes sociales en Inde encore aujourd’hui, est aussi marquée que la discrimination raciale aux États-Unis dans les années cinquante. A cette différence près que cette hiérarchie n’est pas reconnue comme un problème et il paraît comme tout à fait normal d’exploiter des personnes naturellement considérées comme inférieures.

C’est dans ce monde que se passe l’histoire de «  Monsieur  », ce film qui n’est cependant jamais un traité de classe ou de culture.

C’est l’histoire humaine de l’attirance l’un vers l’autre de deux êtres qui, par la sympathie qui les lie, transcendent les normes sociales.

D’entrée de récit, on constate qu’Ashwin n’a pas, vis à vis de Ratna, le comportement qu’ont généralement les gens aisés avec leurs domestiques.

Si Ratna se maintient dans un comportement de dévouement jusqu’à la soumission, le jeune homme fait preuve beaucoup de délicatesse et d’attention à son égard .

Et c’est dans l’observation de la lente évolution des rapports des deux protagonistes que le film trouve sa tonalité. Il se dégage du rapprochement progressif entre Ashwin et Ratna, une douceur, une délicatesse mais aussi une sorte de mélancolie tendre, sachant que la tendresse qui s’insinue dans leur relation entre deux signes d’attentions, deux regards, est peine perdue, condamnée d’avance à ne jamais aboutir, dans une société cadenassée qui veille au grain pour éviter que ne se produise l’inconcevable.

Le récit empreint de douceur ne tombe jamais pour autant dans l’angélisme.

Son traitement qu’on pourrait qualifier de « fleur bleue » est sans cesse contrebalancé par tout ce que le film traite en filigrane de problèmes sociaux : les rapports maître- domestiques en Inde, les mariages imposés, la difficulté pour les gens du peuple à modifier le tracé d’un avenir sacrifié…

Les possibilités d’un rapprochement entre un maître et sa domestique ne peuvent exister qu’en vase clos, dans le film l’intérieur de la maison.

L’alerte est donnée aussitôt que la complicité qui lie entre eux les deux jeunes gens est décelée, que ce soit par les proches d’Ashwin ou par les amis.

En ce qui concerne Ratna, l’avenir est anticipé sachant que si sa famille apprenait le rapprochement qu’elle vit avec son maître, elle serait manu-militari ramenée dans son village qu’elle ne quitterait plus jamais au risque de voir s’envoler tous ses projets….

Une histoire douce qui se heurte au mur des traditions .

Un terrible regard sur la rigidité tenace de certaines sociétés.

Francis Dubois


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