Monravia est une petite agglomération du Midwest américain de mille quatre cents habitants.

Elle a la particularité d’avoir voté à soixante seize pour cent en faveur de Donald Trump aux dernières élections présidentielles.

Des salles de classe aux réunions du conseil municipal, du funérarium aux foires agricoles locales, Frédérick Wiseman nous livre une vision complexe et peu nuancée du quotidien de cette population rurale qui vit dans des univers cloisonnés et cadenassés, figés dans une vue courte des choses, portrait d’une Amérique refermée sur elle-même, souvent oubliée et rarement montrée dont l’absence d’ouverture d’esprit explique le choix électoral.

Cinéma : Monravia, Indiana
Cinéma : Monravia, Indiana

Un film sur une petite communauté fermée du Midwest avait toute sa place dans le série de documentaires que Frederick Wiseman avait déjà réalisés sur les modes de vie des américains.

La ville de Monrovia dans l’Indiana a été choisie par le réalisateur pour sa taille, son emplacement en plein Midwest rural et l’inclinaison de ses habitants pour la croyance et l’agriculture.

C’est sa rencontre avec un professeur de Droit de l’Université de l’Indiana dont la famille vivait depuis six générations dans la même petite ville de cet État qui est à l’origine de projet du Frederick Wiseman.

Plus tard, c’est par l’intermédiaire de ce professeur que le réalisateur a été amené à rencontrer la directrice des pompes funèbres de la ville qui, intéressée par le projet, lui a arrangé un rendez-vous avec le chef de la police, le président du conseil municipal , le directeur scolaire du secteur, les patrons de restaurants et tous ceux qui au fil du temps se sont greffés sur le projet et ont ouvert leur porte à la camera de Wiseman.

Les habitants de la ville se sont montrés coopérants et ont laissé voir tous les aspects de leur vie quotidienne.

Et ce qui est ressorti de plus notable de ces rencontres c’est la totale absence de curiosité et d’intérêt de toutes ces personnes pour le monde extérieur à leur ville.

Les habitants de Monrovia quittent le moins possible la ville, ils se rendent très rarement à Indianapolis qui n’est pourtant qu’à trente minutes de chez eux, ne manifestent aucun intérêt pour ce qui se passe en Europe ou en Asie.

Leur monde c’est Monravia et personne ne parle de politique. Les sujets de conversation tournent autour de la famille, du travail, de la religion très présente, de la maladie, des voitures, du matériel agricole et de leur voisinage et lorsqu’ils sont confrontés à un problème, ils trouvent les réponses dans la bible et ses variantes fondamentalistes.

La camera de Frédérick Wiseman se contente de filmer à partir de réunions, de rencontres, d’événements ponctuels ce qui représente les centres d’intérêt essentiels de cette population repliée sur elle-même, peu encline au doute et au scepticisme.

L’étroitesse d’esprit, l’absence de curiosité, l’intérêt pour les détails les plus infimes de la vie de la ville les tiennent à distance, à l’abri de tout questionnement qui pourrait les faire sortir de leurs certitudes confortables.

Le portrait de cette Amérique pro-Trump se dessine d’une séquence à l’autre, sans qu’il soit besoin de commentaires, d’entretiens explicites.

Les images seules parlent et le silence est éloquent pour peindre une société cadenassée par ses certitudes exemptes de la moindre réflexion.

Un film remarquable. Une réponse sans appel à la réalité de la montée de l’extrême droite qui fait froid dans le dos…

Francis Dubois


Bienvenue sur le blog Culture du SNES-FSU.

Des militants partagent ici des critiques littéraires, musicales, cinématographiques ou encore des échos des dernières expositions mais aussi des informations sur les mobilisations des professionnels du secteur artistique.

Des remarques, des suggestions ? Contactez nous à culture@snes.edu