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Danis et Eric, la trentaine, deux amis d’enfance issus d’un milieu ouvrier, travaillent sur les docks du Havre. Et qu’ils soient chargé de famille ou célibataire, ils peinent de la même façon à joindre les deux bouts.
Un jour Alex, la sœur d’Eric, assiste par hasard à la passation d’une valise pleine de billets de banque, entre deux individus.
Elle décide de suivre l’homme qui a récupéré le pactole jusque chez lui. Elle franchit le mur de la propriété et tombe sur une somptueuse demeure.
Elle parle à Eric et Danis de sa découverte et très vite, arrive à les convaincre de cambrioler la villa. Ils finissent par se ranger à ses arguments et convenir qu’une grosse somme d’argent à se partager pourrait changer leurs existences.
Ils décident de l’heure du cambriolage mais au moment où ils pénètrent dans la maison, ils trouvent un homme qui vient tout juste de se pendre.
Ils le détachent instinctivement et le sauvent de justesse.
Il s’agit de Mercier dont ils ignorent l’identité à ce moment-là et qui se trouve être le Ministre de la sécurité du pays acculé au suicide par les menaces de maîtres chanteurs.
Un jeu du chat et de la souris s’engage et la valise va passer de main en main, échapper à chacun à tour de rôle non sans coûter la vie à quelques-uns.
« Money » est un film de genre à l’ancienne auquel il ne manque ni arme au poing, ni poursuite en voiture, ni valise bourrée de grosses devises.
L’appellation « film à l’ancienne » n’a rien de péjoratif surtout dans le cas de « Money » dont la construction solide, les cadrages millimétrés, une distribution de toute beauté, une lumière soignée se mettent au service des thèmes classiques abordés, l’attachement à la famille, l’amitié, la solidarité en milieu ouvrier, les habitations à la périphérie des villes et un magot que tous les protagonistes convoitent.
On pourrait préciser « un film à l’ancienne mais résolument moderne ». Le contour des personnages en prise directe avec notre époque est taillé au scalpel et cette justesse résonne sur tout le récit. Jeunes ouvriers employés aux docks, ils risquent de s’endormir sur une vie partagée entre les coups au comptoir avec les copains, la maison et une une petite cylindrée qu’ils poussent à fond. Mais un mauvais ange veille et l’appât du gain ouvre sur toutes les audaces et voilà le trio peu rôdé à ce genre d’exercice qui enfile cagoule, avance revolver au poing et joue les malfrats. Mais l’incident qui survient amènera le grain de sable dans l’engrenage et face au détenteur de la valise au trésor qui se débat au bout d’une corde, ils vont redevenir pour un moment les bons petits gars qu’ils sont, mais cet instant d’humanité qui n’est pas dans le registre des vrais braqueurs va contribuer à faire foirer la machine,
Car, si Eric et Danis sous des allures machistes délimitent mal les frontières de leur courage, s’ils passent d’audace en hésitation et fragilité, Mercier, le politique ripou est un personnage beaucoup plus complexe qui se révèle par states successives.
Le monde des truands est montré sans surlignage excessif et les dessous des affaires des hommes politiques aidés de leur sbires ne surprend plus personne aujourd’hui.
Gela Babluani jongle avec virtuosité avec les incessants rebondissements de l’histoire, un léger suspense et surtout entre la comédie et le drame et ce brassage dosé où le film s’engage est parfaitement conduit et les situations les plus dramatiques ont généralement un point de départ drôle.
Les jeunes comédiens, Vincent Rottiers en tête, sont épatants et Louis Do de Lencquenssaing compose un ministre de la sécurité ambigu, peut-être un homme humain perverti pas la politique…
Francs Dubois
Des militants partagent ici des critiques littéraires, musicales, cinématographiques ou encore des échos des dernières expositions mais aussi des informations sur les mobilisations des professionnels du secteur artistique.
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