Jocelyne et Serge Klur, un couple de quinquagénaires, se retrouvent du jour au lendemain dans une situation financière désastreuse.
L’usine qui les employait et qui fabriquait des vêtements hauts de gamme à Poix-du-Nord dans la région de Valenciennes, a été délocalisée en Pologne.
Ils sont sur le flanc, criblés de dettes et ils vont sans doute devoir vendre leur habitation.
François Ruffin, le fondateur du journal « Fakir » , averti de la situation, décide d’agir pour sauver les Klur. S’il leur faut trouver trente mille euros pour garder la tête hors de l’eau, il en fera son affaire.
Avec l’aide de quelques complices : un inspecteur des impôts belge, une bonne sœur ancienne déléguée CFDT, un membre de la CGT et des ex-vendeurs de la Samaritaine, il va, en se faisant passer pour le fils du couple, échafauder un simulacre de chantage sur le Groupe LVMH et son PDG Bernard Arnaud.
Les David-pieds-nickelés-farceurs-picards réussiront-ils à duper le premier groupe de luxe au monde et l’homme le plus riche de France ?
David aura-t-il gain de cause sur le géant Goliath ?
Plutôt que de prendre le sujet du chômage comme un drame, François Ruffin a fait le choix de le traiter avec humour.
En faisant du slalom entre documentaire et fiction, sans se départir de l’esprit du canular potache, il trouve le moyen d’aborder de façon totalement nouvelle le quotidien de ces drames sociaux face auxquels on est généralement impuissant, faute de moyens de contrer ce que l’on considère comme appartenant dorénavant à l’ordre des choses.
« Merci Patron « , entre farce et tragédie, suit le fil d’une véritable dramaturgie, repose sur une construction en actes et bénéficie d’un rythme soutenu qui le fait plonger dans une sorte de suspense haletant
Tous les personnages du film sont les vrais personnages de l’histoire. Jocelyne et Serge Klur sont à la fois les protagonistes du drame social et les acteurs (et quels acteurs!) de leur propre vie. Il en est de même pour Marie-Hélène Boulard, la déléguée CGT ou Catherine Thierry déléguée CFDT, le commissaire des renseignements généraux et François Ruffin soi-même, les deux médiateurs ou Bernard Arnault qui, à son insu a contribué au scénario.
Les images du film sont parfois montées en parallèle avec des reportages, des images d’archives et cette cohabitation agit comme un contrechamp.
Mais comment, avec comme seules armes un journal peu connu, la simple menace de livrer aux médias un courrier relatant le cas du couple Klur et quelques autres simulacres, ou en devenant un minuscule actionnaire du groupe afin d’assister aux assemblées générales, peut-on attirer l’attention et finalement impressionner une entité aussi puissante que LVMH ?
François Ruffin est un metteur en scène malin. Il met en scène son film avec la même jovialité, le même culot qui lui ont permis de monter l’extraordinaire machination et de faire tomber dans son piège le groupe puissant et son PDG.
C’est drôle, savoureux, réjouissant de bout en bout et on garde du drame où se trouvait au départ le couple Klur, le souvenir de la bonne humeur dont ne se seront jamais départis les personnages.
On pourrait résumer le film en disant qu’il est « sérieux comme une comédie » !
Francis Dubois
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