Mariana, la quarantaine passée, issue de la haute bourgeoisie chilienne, a d’abord cédé aux influences de son père et plus tard à celles de son mari.

Elle se réveille de sa soumission dès lors qu’elle se met à ressentir une étrange attirance pour Juan, son professeur d’équitation.

Juan a soixante ans et cet ex-colonel est suspecté d’avoir commis des exactions pendant la dictature de Pinochet.

La liaison entre Mariana et Juan ébranle les murs invisibles qui protégeaient jusque là cette famille de son passé.

Jusqu’où Mariana, devenue aussi curieuse de ceux qui l’entourent qu’imprévisible, sera-t-elle capable d’aller quand d’eux mêmes, les voiles se seront levés ?

Cinéma : Mariana
Cinéma : Mariana

Pendant le tournage de son documentaire «El Mocito», Marcela Said a fait la connaissance d’un ex-colonel de l’armée qui était, à ce moment-là, maître d’équitation d’un centre équestre dans la région de Santiago. Cet homme fut, sous la dictature, le chef d’un Centre de répression dans lequel des centaines de personnes avaient disparu.

Marcela Said avait souhaiter parler avec lui de cette période mais il se montra réticent à revenir sur cette période de sa vie. C’est alors que, pour garder un contact avec cet homme dont le parcours l’intéressait, elle lui demanda de lui donner des cours d’équitation.

Il fut son professeur jusqu’en 2011, date à laquelle il fut condamné à la prison à perpétuité.

C’est à ce moment là que le scénario de « Mariana» s’imposa comme une évidence mais le cœur du projet ne serait pas l’histoire d’amour entre la jeune femme et le colonel en attente du verdict mais le récit d’une femme prise en étau entre quatre hommes tous aussi redoutables les uns que les autres : le colonel, le père, le mari et le policier.

L’histoire d’une femme navigant en eaux troubles et qui espère trouver la voie de son autonomie au bout d’une longue période de turbulences.

Le monde de Mariana est celui de haute bourgeoisie chilienne, une société marquée par la violence et le total déni de ses responsabilités dans la mise en place de la dictature, sa perpétuation et les crimes commis.

Dans son film, Marcela Said tente de démontrer que la frontière est ténue entre le bien et le mal. Elle a choisi, pour illustrer cette ligne, le personnage du Colonel qui est à la fois un bourreau et un sauveur, un personnage qui a lui seul commet le crime et la rédemption, représente la ligne ambiguë entre le désir et la répulsion, la douleur et l’extase.

Et tous les personnages du récit sont dans son sillage, le père castrateur et protecteur, le mari aimant et tortionnaire, le policier salvateur et manipulateur.

« Mariana» est l’histoire d’une femme amoureuse de sa souffrance qui, après avoir lutté autant que possible pour son autonomie, se retrouve au final à n’avoir d’autre choix que de retourner à sa servitude volontaire.

C’est une œuvre étrange où différents thèmes et humeurs s’entremêlent et se répondent et qui apporte en filigrane, un éclairage nouveau sur les années Pinochet, sur celles qui ont suivi la chute du dictateur et sur le rôle qu’y a tenue la bourgeoisie chilienne.

Francis Dubois


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