Au Congo, Kadwita Kasongo, un jeune villageois de vingt huit ans, marié et père de plusieurs enfants se montre très soucieux d’offrir la meilleure vie possible à sa famille.
Mais il ne dispose, comme seule ressource, que de ses bras, que des maigres ressources de la brousse environnante et sa forte volonté.
Il part sur les chemins caillouteux jusqu’à la périphérie de la grande ville de Kolwezi pour vendre au meilleur prix le fruit de son travail.
Le voyage est dangereux et épuisant et Kadwita découvrira, au terme de longues heures de marche, le valeur de ses efforts et le prix de ses rêves.
Emmanuel Gras fut découvert en 2012, à Cannes où son premier long métrage documentaire était projeté dans la sélection de l’Acid. « Bovines», un film animalier dans lequel apparaissait nettement la singularité du travail de ce jeune metteur en scène.
Au cours de séjours au Congo, où il participait à des tournages comme chef-opérateur, Emmanuel Gras avait remarqué, sur le bas-côté des routes, des hommes et des femmes qui transportaient à pied de lourds chargements sur des vélos.
Il y avait parmi eux, ceux qui poussaient des vélos chargés de sacs de charbon.
D’où venaient-ils, quelles distances parcouraient-ils avec leur chargement et qu’est que ce commerce pouvait leur rapporter ? Quels efforts pour quels résultats ?
Le hasard a voulu qu’il rencontre Kabwita et au bout que quelques échanges, il a su qu’il ferait avec lui un film sur le sujet.
Un an plus tard, une fois les financements obtenus, Emmanuel Gras revenait à Walembra, retrouvait Kabwita et le tournage du film commençait.
Il était question pour le réalisateur de filmer le travail de charbonnier de Kabwita du début jusqu’à la fin du cycle, du moment où il abat l’arbre jusqu’à celui où il négocie la vente de son charbon en ville.
Il était important pour lui que le charbonnier travaille seul.
Les différentes phases du travail donnaient un cadre précis à la structure du film. Emmanuel Gras filme de jour et de nuit, jusqu’au voyage du village jusqu’à la ville.
Un charbonnier qui abat seul un arbre monumental, qui le débite en tronçons, qui construit son four,
qui traite le charbon, le met en sacs, le charge sur son vélo et prend la route de la ville pour le vendre, cela suffirait-il à faire un film ?
Non seulement Emmanuel Gras en fait un film passionnant en débusquant la personnalité de Kabwita jusque dans son intimité, en mettant une gradation dans la construction du récit, en installant dans la deuxième partie une sorte de suspense lorsque le charbonnier, qui a quitté les chemins de campagne, arrive à proximité de la ville et qu’il est obligé d’emprunter des voies saturées de circulation auxquelles il n’est pas habitué et qui représentent pour lui un réel danger de chaque instant.
Aux épisodes de jour succèdent ceux de la nuit et la photo, à tout moment superbe, épouse les degrés de fatigue de Kabwita, sa fragilité et celle de son embarcation quand il n’est plus, au milieu du vacarme et dans l’agitation de la circulation, qu’une sorte de fétu de paille, l’homme misérable qu’il est en réalité.
Magnifique à tous points de vue !
Francis Dubois
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