A Caracas de nos jours, Armando, un quinquagénaire solitaire et inhibé, partage sa vie entre son appartement cossu et son travail de prothésiste dentaire.

Parfois après avoir déambulé dans la ville, il jette son dévolu sur un jeune homme qu’il ramène chez lui.

En échange d’une jolie liasse de billets, il lui demande de se déshabiller partiellement, se masturbe face à sa demi nudité mais sans que pour aboutir au plaisir, il n’ait jamais recours au moindre attouchement.

Mais lorsqu’Armando rencontre Elder, une petite frappe des bas quartiers de la ville, les règles de la fois unique avec chaque partenaire et de l’absence de contact physique se trouve changée.

Armando dissimule mal la fascination qu’il a pour le garçon alors que celui-ci, attiré par l’argent facile, renouvelle ses visites.

Petit à petit, une relation plus intime s’installe entre eux et le plaisir de s’approcher devient le grain de sable dans la vie réglée d’Armando et dans la répulsion qu’il montrait jusque-là pour le moindre contact physique.

Cinéma : les amants de Caracas
Cinéma : les amants de Caracas

Armando n’entretient avec une sœur qui a fondé une famille que des rapports distants et à Elder qui lui demande si son père vit toujours, il répond par l’affirmative en ajoutant sans plus d’explication qu’il préférerait que le vieil homme d’affaires soit mort.

Quant à Elder, sa seule famille se résume à un père qui purge une peine de prison.

Depuis son court métrage «  Les éléphants n’oublient jamais » Lorenzo Vigas Castes a toujours construit ses scenarii sur le thème de la relation au père.

«  Les amants de Caracas  » explore le même sujet. Mais si le court métrage était centré sur le désir de vengeance d’un frère et d’une sœur contre leur père abusif, ici les liens qui s’établissent entre deux êtres à tous points de vue différents trouvent leur origine dans l’absence de figure parentale même si de l’un à l’autre elle est de nature différente.

Et c’est autour de ce manque et du mystère qui entoure le contentieux entre Armando et son père que va se tisser la construction dramatique du récit.

Lors de leur première rencontre, la violence dont Elder fera preuve vis-à-vis d’Armando sera la première faille dans la part de désir enfouie du quinquagénaire. Bien que violent, ce premier contact va le bouleverser. Dès lors Armando sera-t-il capable d’établir une vraie relation avec une autre personne et envisager de faire d’une relation éphémère, l’histoire d’amour qu’il s’est toujours interdit de vivre ?

Elder trouve en Armando quelqu’un qui le prend en considération et lui apporte une stabilité financière et Armando en Elder l’occasion de ressentir des émotions qu’il n’avait jamais dépassées jusque-là.

« Les amants de Caracas  » se déroule dans le Venezuela d’aujourd’hui où la crise sociale et économique a provoqué de nombreux bouleversements. Un pays marqué par la lutte des classes où le fossé qui s’est creusé entre riches et pauvres est incommensurable.

Si le besoin absolu d’affection qui rapproche les deux protagonistes est universelle, elle touche ici à l’homosexualité un sujet auquel, comme dans de nombreuses cultures sud-américaines, la société reste très opposée.

Lorenzo Vigas est un réalisateur cinématographiquement « économe ». Chaque plan de son film est ciselé, réduit à sa plus stricte utilité. Les dialogues sont comptés et on garde surtout de «  Les amants de Caracas  » l’image de son interprète principal, Alfredo Castro, comédien chilien au masque impénétrable et dont le regard qu’on pourrait croire inexpressif exprime, en souterrain, les vibrations intérieures multiples du personnage.

Francis Dubois


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