En 1983, le scénariste Krzysztok Piesiewicz propose de filmer les dix commandements en s’inspirant d’un polyptique exposé à la Galerie nationale de Varsovie divisé en dix scènes de la vie quotidienne.

Mais le projet de traiter pour le cinéma un sujet considéré comme sacré est-il envisageable dans le pays catholique qu’est la Pologne ?

Inspiré des dix commandements de l’ancien testament, dix épisodes de moins d’une heure montrent les habitants d’un immeuble de Varsovie confrontés à des choix moraux majeurs.

Le tournage a finalement lieu pour un passage des dix films à la télévision mais le résultat final surprend favorablement, intéresse de plus en plus de festivals et lors de la projection de «  Tu ne tueras point  » le public est sous le choc.

En peu de temps le réalisateur Kieslowski connaît une renommée internationale.

La première mondiale des films a lieu au Festival de Venise en 1989 avant que la BBC ne les diffuse dans un premier temps à une heure tardive, puis en primetime, vu le chiffre record des audiences : 12 à 15 millions de spectateurs.

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Le matériau de ces fictions est ancré dans la réalité. Il a différentes sources mais ce sont le plus souvent des événements vécus dans l’environnement de Kieslowski ou de Piesiewicz qui, en tant qu’avocat, puisa ses idées dans certains dossiers.

Ce furent des témoignages recueillis et parfois des histoires que racontaient les comédiens, inspirées de la vie réelle.

Dans «  Tu ne commettras point de parjure  » un père athée décrit la mort comme un arrêt mécanique des organes au jeune garçon qu’il élève seul, alors que sa tante, croyante, tente de lui transmettre la foi en Dieu.

« Un seul dieu tu adoreras  » expose Dorota, jeune femme enceinte à un dilemme : avouer à son mari, gravement malade qu’il n’est pas le père de l’enfant qu’elle attend ou avorter pour ne pas avoir à lui mentir.

Dans «  Tu ne seras pas luxurieux » Tomek, jeune homme introverti finit par avouer à Magda, une voisine qui accueille chez elle des amants différents, qu’il assiste à ses ébats à l’aide de jumelles depuis la fenêtre de sa chambre.

«  Tu ne tueras point  » met en scène un jeune homme désœuvré qui commet un assassinat gratuit sur la personne d’un chauffeur de taxi et l’avocat commis d’office pour sa défense dont ce sera la première plaidoirie.

L’originalité des sujets, le cadrage des plans, les lumières dégageant des atmosphères souvent oppressantes, l’utilisation de gros plans, produisent un décalage narratif presqu’imperceptible mais qui, comme par magie, de façon presque subliminale marque avec une unité de ton, chacun des opus du décalogue.

Vingt ans après la mort de Kieslowski «  Le Décalogue  » a été restauré pat la TVP (Télévision publique polonaise) avec le soutien de tous les chefs opérateurs.

Considérée comme «  un polar de l’âme  » (Télérama), la série télévisuelle avait en son temps opéré une influence majeure sur de nombreux réalisateurs.

« Le Décalogue  » surprend aujourd’hui par sa modernité.

En filmant l’indicible, le pressentiment, l’émotion, le doute, Kieslowski pose un regard singulier et aigu sur la responsabilité de l’homme face à lui-même et à sa place dans la société.

A (re)découvrir absolument.

Francis Dubois


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