Sonia, dix-sept ans, a été refoulée au cours d’un contrôle, au moment où elle partait en Syrie rejoindre les cellules terroristes dans l’optique de garantir une place au paradis à ses parents.
Mélanie, seize ans, élève brillante, musicienne va s’engager dans les rangs de Daech pour aider à changer un monde qu’elle juge perverti.
Elle a été recrutée, via internet, par un garçon dont le discours l’a séduite, qu’elle veut épouser pour vivre avec lui la vie idyllique qu’il lui promet.
Marie-Castille Mention-Schaar, en s’appuyant sur deux cas de jeunes filles à la fois proches et distincts, a voulu démonter les mécanismes d’embrigadement et de radicalisation.
Dans les deux cas (Sonia vit avec ses deux parents, Mélanie seule avec sa mère) la famille n’a rien soupçonné de l’engagement des adolescentes et les parents de Sonia, quand on leur a ramené leur fille qui venait de se faire refouler à la frontière syrienne, ont été profondément surpris.
Poussée par une actualité brûlante, Marie-Castille Mention-Schaar considère que le projet de réaliser « Le ciel attendra » s’est imposé à elle presque par effraction.
Elle a abandonné en cours de route un autre projet avancé jusqu’au stade du casting, après avoir lu un article sur un frère parti à la recherche de sa sœur en Syrie.
Sa rencontre avec des journalistes qui couvrent le sujet sonne le départ du scénario, que vient confirmer cette autre rencontre, celle que la réalisatrice fait avec Dounia Bouzar, une psychologue qui apporte une écoute et un soutien au désarroi et à la solitude qui submergent les familles concernées par l’embrigadement de l’un des leurs.
Avec son équipe, Marie-Castille Mention-Shaar a accompagné Dounia Bouzar partout en France où la radicalisation l’appelait. Elle découvre une réalité avec le processus de désembrigadement et mise face aux jeunes gens et à leurs familles, elle voit se dessiner les personnages de son film.
La fabrication d’un film sur le sujet est forcément militant. Il est conçu pour être vu par le plus grand nombre afin de sensibiliser au problème les jeunes gens exposés au risque et les familles qui y sont confrontées.
Dans les personnages contrastés des deux jeunes filles, les adolescentes peuvent aisément se retrouver. Assez finement écrits, elles offrent les caractéristiques propres à l’âge : désir d’indépendance, conflit avec les parents, rapports aux autres adolescents, cellules familiales correspondant à des stéréotypes…Les personnages des parents sont moins travaillés mais Sandrine Bonnaire, Clothilde Courau et Zinedine Soualem s’efforcent de leur donner consistance dans des registres différents.
Si le film n’échappe pas à certaines facilités, il se regarde avec intérêt et la jeune Naomi Amarger, dans le rôle de Mélanie, révèle une nature promise à un bel avenir.
Francis Dubois
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