Evelina est femme de chambre dans un luxueux hôtel de Mexico. Malgré son maigre salaire, elle a dû trouver une personne pour garder sa petite fille pendant ses heures de travail. Dans la perspective d’obtenir une promotion et d’être affectée au quarante deuxième étage convoité pour ses différents avantages, elle qui sait à peine lire suit des cours de perfectionnement.

Pour rompre avec la monotonie des journées de travail, elle se rêve revêtue un jour de la robe rouge qu’une cliente de l’hôtel a oubliée dans sa chambre et qui devrait lui revenir, passé le délai légal imposé et trouve auprès d’une collègue extravertie des moments où elle peut retrouver le sourire.

Cinéma : La camarista
Cinéma : La camarista

Le décor du film de Lila Avilès ne déborde jamais les limites de l’hôtel où Evelina passe ses journées et l’action du récit, à ses allées et venues d’une chambre à l’autre, des courts moments qu’elle passe à la cantine ou à la lingerie, à ces moments volés où elle téléphone à sa petite fille.

Prise au piège de ce décor limité et des rares contacts qu’elle peut avoir avec ses collègues, la jeune femme a peu de possibilités de s’évader ; elle peut à peine se nourrir de l’espoir de changer d’étage pour un salaire meilleur et la seule échappée possible est dans le plaisir de pouvoir revêtir, passé les délais imposés par la réglementation, la fameuse robe rouge oubliée dans une chambre.

La force du film de Lila Avilès réside dans l’économie d’espace et dans la répétition des allées et venues et gestes où le moindre pas de côté a valeur d’évasion et peut faire naître un sentiment de culpabilité chez Evelina qui trouve dans le déroulement des cours de perfectionnement et dans l’air de liberté qu’ils représentent, dans les échanges qu’elle a avec une de ces collègues, la promesse qu’une autre vie existe et qu’on peut y accéder sans pour autant avoir l’impression de commettre une faute.

Evelina, dont on ignore tout de ses origines sociales mais dont on suppose qu’elle appartient à un prolétariat inférieur rompu à toutes les soumissions, découvre au contact d’une cliente de l’hôtel dont elle surveille le bébé pendant qu’elle prend sa douche qu’elle pourrait prétendre à certains égards et qu’en libérant ses cheveux ou en souriant, elle peut être belle.

Et même si elle n’obtient pas la robe qu’elle convoitait, même si pour l’entretien des chambres du quarante deuxième étage, on lui préférera une autre employée, Eveline trouvera au fond d’elle-même assez de ressources pour continuer et espérer.

«  La camarista  » dresse le portrait d’un personnage invisible, qu’il passe inaperçu aux yeux des autres ou qu’il serve d’exutoire à ceux qui ont besoin de l’apparence et du regard de l’autre pour exister.

Lila Avilès, avec un récit minimaliste, donne une parole qu’elle a du mal à prendre à un personnage de l’ombre et lui donne un éclairage intérieur révélateur.

Francis Dubois


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