Samir, la quarantaine, personnage lunaire qui pose sur le monde un curieux regard à la fois ironique et absent, est grutier à Montreuil.
Lorsqu’il la croise, il est foudroyé d’amour pour Agathe, le belle maître-nageuse à la piscine municipale.
Pour approcher l’objet de son amour débordant, il décide de prendre des leçons de natation alors qu’il est déjà un bon nageur.
Naturellement son mensonge ne tient pas longtemps et Agathe qui n’aime pas les menteurs, retire à Samir la sympathie qu’elle avait pu lui témoigner dans les premiers temps de leur rencontre et du jour au lendemain, disparaît des bords de la piscine.
Choisie pour représenter la Seine-St Denis, Agathe est partie en Islande pour participer au dixième congrès international des maîtres-nageurs.
Quand il l’apprend, Samir ne trouve d’autre solution que de partir pour l’Islande et pour approcher Agathe, de se faire passer pour un maître-nageur.
Quel effet l’ambiance humide d’une piscine ou de sources chaudes peut-elle avoir sur le comportement de deux personnes destinées l’une à l’autre, dont une n’en est pas convaincue ou ne le sait pas encore ?
Solveig Anspach réussit avec « L’effet aquatique » un objet cinématographique singulier qui arrive à faire cohabiter deux genres habituellement incompatibles, le burlesque et la comédie romantique.
Elle entraîne ses personnages dans des aventures un peu folles en s’appuyant sur un scénario construit avec des ouvertures sur le réel et la pure fantaisie.
Elle bénéficie, pour atteindre la coloration singulière de son récit, de la complicité de deux comédiens avec lesquels elle n’en est pas à une première aventure commune, avec qui elle avait déjà tourné notamment « The queen of Montreuil » : Samir Guesmi et Florence Loiret-Caille.
Samir Guesmi joue son personnage à la marge de toute catégorie comportementale répertoriée. Rêveur mais déterminé, timoré mais audacieux, ironique et absent, il réduit à néant tout ce qui pourrait venir en obstacle à son objectif avec une innocence confondante. C’est lui qui apporte la dimension burlesque au film et qui permet par ricochet au personnage d’Agathe de se délester de ses tendances pragmatiques, pour s’accorder petit à petit dans son jeu et à Florence Loiret-Caille de développer son potentiel d’irrésistible comédienne comique.
Le titre du film surprend mais il est sans doute à prendre au premier degré.
Le projet de Solveig Anpach était d’aborder le monde aquatique domestique (une piscine municipale dans une cité de la périphérie parisienne) et le monde aquatique sauvage des sources chaudes islandaises.
Le passage du domestique au sauvage souligne le franchissement du passage à l’amour des deux protagonistes.
Il y a, dans « L’effet aquatique « , des moments où le récit semble rester suspendu. Il ne s’agit pas de chutes dans son déroulement (le film n’est jamais soumis à un rythme obligé) mais d’espaces narratifs qui permettent le bon équilibre et le tissage harmonieux du réalisme, de la comédie, du burlesque et de l’émotion.
Le tournage de « L’effet aquatique » s’est déroulé fin 2014 pour la partie montreuilloise et pour la partie islandaise début 2015. Le montage en était arrivé aux trois quarts quand Solveig Anpach est décédée en août 2015 d’une maladie qui la menaçait depuis de longues années. Il a été achevé collectivement par une partie de l’équipe technique du film et par Patrick Solbernan, le producteur.
Francis Dubois.
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