Nathalie est professeur de philosophie dans un lycée parisien tout comme Heinz, son mari. Une grande complicité intellectuelle unit le couple.
Passionnée par son travail, Nathalie entretient des contacts cordiaux avec ses élèves que son enseignement passionne. Elle est restée en relation avec certains de ceux qui ont fréquenté ses classes autrefois, notamment Fabien avec qui elle a pris l’habitude d’échanger des ouvrages dont ils vont parler à la terrasse d’un café ou sur un banc dans un jardin public.
Or, tout à coup, tout se précipite autour de Nathalie qui considérait comme immuables les éléments repères qui composaient sa vie.
Son mari dont elle ne se doutait pas qu’il puisse ne plus l’aimer un jour, lui annonce qu’il la quitte pour aller vivre avec une autre femme. Sa mère dont le comportement fantasque lui prenait beaucoup de son temps, meurt subitement. Ses deux enfants qui ont grandi sont maintenant autonomes et le contrat qu’elle avait signé avec une maison d’édition est rompu.
Confrontée à une liberté nouvelle, elle va réinventer sa vie.
On pourrait dire de « L’avenir » que c’est un récit en sourdine dont les événements les plus saillants ne dépassent jamais les limites de la vie de tous les jours de personnages dont la particularité est d’appartenir au monde des intellectuels.
On y voit Nathalie dans l’exercice de son métier de pédagogue.
Elle a su trouver le ton juste pour s’adresser à ses élèves.
On la retrouve installée dans une vie de famille confortable à laquelle elle ne semble pas donner plus qu’il ne faut, face à une mère fantasque et capricieuse avec qui elle se comporte entre tendresse et exaspération, un époux auquel elle est liée depuis plus de vingt ans, avec qui elle partage le goût des livres et l’immense bibliothèque qui tapisse les murs de l’appartement cossu.
Elle aime la Bretagne où ils possèdent une maison de famille, l’été, les promenades, les bains de mer.
Sa formation de philosophe lui a fourni une sorte d’assurance contre les coups durs. De sorte que, lorsqu’ils surviennent, elle les accuse avec sagesse et beaucoup de calme même s’ils peuvent occasionner des ravages intérieurs dont elle fait plus ou moins son affaire.
Avec le personnage ciselé de Nathalie, interprétée par une Isabelle Huppert époustouflante qui n’arrête pas de renouveler son jeu d’une fois à l’autre, Mia Hansen-Love dresse le portrait d’une quadragénaire (presque) quelconque et le tracé en pointillés de son avenir dès lors que les bases sur lesquelles s’était construite sa vie lui font subitement défaut.
C’est, prise dans cette parenthèse tâtonnante, en vivant au jour le jour, à l’instinct, qu’elle va créer ses nouveaux repères.
La virtuose réalisatrice Mia Hansen-Love se met au service de la minutieuse et sensible scénariste Mia Hansen-Love et le résultat est un récit qui coule de source, qui avance avec fluidité et accompagne un courageux « petit soldat » dans une nouvelle phase de son existence.
Filmer Paris, ses rues, la sortie d’un grand lycée parisien, les allées d’un parc, saisir l’humeur d’un quartier, Mia Hansen-love et son directeur de la photographie savent faire comme ils savent filmer une ferme perdue dans le Vercors, un retour à la terre version 2015, un petit déjeuner devant la maison, la fuite d’un chat des villes qui s’émancipe…
Une certaine presse a démoli à sa sortie « Ce sentiment de l’été » d’Anders Danielsen. Celle-ci pourrait démolir de la même façon « L’Avenir » parce que c’est un film intimiste qui n’obéit ni aux codes du cinéma populaire, ni à ceux du cinéma « intello », qu’il joue solo et qu’il se reconnaît en lui-même.
Francis Dubois.
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