A Nunavut, dans le Grand Nord canadien, Nana Kunning s’en va consulter un guérisseur pour l’un de ses deux fils malade qu’elle élève seule.

Cette rencontre va bouleverser son existence et après la mort accidentelle de son enfant, elle abandonne le survivant à son grand père avant de devenir, à son tour, guérisseuse aux confins du cercle polaire.

Vingt ans plus tard, son fils Ivan, qu’elle n’a jamais revu, part sur les traces de sa mère, cédant à l’insistance de Jania, une journaliste française dont il découvrira que, malade et ayant mis un terme à tout traitement médical, elle a fondé ses derniers espoirs dans les pratiques de guérisseuse de Nana Kunning.

Cinéma : l'attrape-rêves
Cinéma : l’attrape-rêves

Les toutes premières images du film montrent un paysage du grand Nord sur lequel souffle un vent glacé et on peut, d’ores et déjà imaginer que le décor dans lequel baignera tout le déroulement de «  l’attrape-rêves  » va privilégier ces paysages oppressants et toujours vaguement chargés d’un danger latent.

Le film de Claudia Llosa fonctionne sur des contradictions.

C’est, dans un premier temps, le portrait d’une mère aimante et dévouée, prête à pousser toutes les portes possibles pour aider son fils à guérir mais qui, lorsque l’enfant malade périra, non de sa maladie, mais au cours d’un accident qu’aura provoqué son frère aîné, mettra en stand-by ses obligations maternelles.

Elle abandonnera le survivant et changera totalement de vie sans doute dans le but de trouver un vrai sens à sa tragédie.

Cette décision radicale, Nana l’a prise peut-être aussi parce que l’accomplissement de son deuil risquait de détruire son fils aîné.

Et on peut penser qu’elle a emprunté cet autre chemin, celui de devenir guérisseuse comme la manière symbolique de guérir enfin son enfant défunt.

Les précédents films de Claudia Llosa tournés au Pérou étaient baignés de soleil. Celui-là est tout le contraire et les décors glacés, énigmatiques, les forêts gelées, la ligne d’horizon qui se confond avec le ciel sont déterminants pour la caractérisation des personnages.

Le film échappe totalement aux drames qui menacent ou surviennent à cause d’un parti-pris esthétique qui prédomine, d’une caméra qui filme de si près les personnages (les visages) qu’ils en deviennent transparents, qui, souvent filme (avec beaucoup de virtuosité) les corps en mouvement et parfois, égare les images dans un esthétisme glacé qui passe à la trappe toute chance de traduire une émotion.

Loin du mélodrame vers lequel tendait le sujet, le film qui ne laisse cependant jamais se perdre le fil du récit, prend souvent la forme d’un exercice de style.

Si on se perd parfois dans le dédale des flash-back, si le film entretient un arrière-plan énigmatique dont il aurait pu se passer, on garde après la projection une impression d’évasion et en mémoire les immenses paysages glacés.

Francis Dubois


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