Si Aurore redouble sa classe de cinquième, ce n’est pas qu’elle manque des moyens qui lui permettraient de réussir sa scolarité mais c’est parce qu’elle est rentrée dans une spirale négative qui a fait d’elle une écorchée vive, une gamine irascible persuadée que le monde entier s’est ligué contre elle.

Sa mère est « atroce ». Son père est « atroce ». Sa petite sœur, enfant modèle, l’est aussi et elle, elle est la pire de tous.

Ses professeurs s’acharnent sur elle. Ses résultats médiocres lui importent peu mais quand elle a obtenu un quinze en français, son visage s’illumine et elle ne cache même pas sa joie.

Le tout est couronné pas la menace de se retrouver en pension après le vacances de la Toussaint.

Mais comme si tout ça ne suffisait pas, elle invente qu’elle a été victime d ‘une agression sexuelle dans sa petite enfance et que ce choc psychologique la menace de frigidité ou la conduira à être homosexuelle.

Et alors qu’elle semble avoir trouvé l’apaisement au sein d’un groupe musical où elle intervient comme chanteuse, on lui annonce qu’elle va devoir se produire pour la première fois en public et que pour l’occasion, elle apparaîtra dans une robe blanche…

Cinéma : jamais contente
Cinéma : jamais contente

« Jamais contente  » est l’adaptation du «  Journal d’Aurore  » de Marie Desplechin.

Si ici, le portrait d’une adolescente en pleine crise, irascible et négative, ne fait pas l’économie d’un certain nombre de clichés (sans doute incontournables) Emilie Deleuze n’en déjoue pas moins de nombreux pièges pour proposer la peinture de parents d’aujourd’hui qui n’appartiennent ni à la catégorie des bobos, ni à celle des beaufs, parfois dépassés par les événements, parfois maladroits mais toujours dans une tonalité juste.

On craint, au début, que l’usage de la voix off qui obéit au parti-pris du journal intime ne surcharge le récit. Mais là encore, Emilie Deleuze déjoue le piège Elle le fait d’autant mieux, que par sa seule présence et par la justesse de son jeu, la jeune interprète du personnage d’Aurore intègre très vite ce qui aurait pu devenir pesant et redondant.

La force de la mise en scène de «  Jamais contente « est de donner à la fois les portraits réalistes d’une adolescente et de sa famille en prise directe avec notre époque et une sorte de conte de fée contemporain qui s’achève en apothéose et dans l’émotion des retrouvailles.

Les scènes de classe sonnent juste tout comme les séquences familiales, tout comme les dialogues qui ne tombent jamais dans le cliché.

Tous les comédiens s’acquittent avec bonheur de leur partition et la jeune Léna Magnien, magnifiquement dirigée, rend crédible et émouvante la transformation, depuis l’adolescente renfrognée jusqu’à l’épanouissement lumineux.

Même si «  Jamais contente  » reste un film de plus sur le passage difficile de l’adolescence, même si tous les clichés ne sont pas évités, on s’attache à tous ces personnages dans lesquels chacun se reconnaîtra.

On ne peut que se réjouir d’une distribution impeccable. Mais un mention spéciale peut être attribuée à Alex Lutz qui campe un professeur de français épatant de sensibilité et de lucidité.

Francis Dubois


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