Antoine Doriot est un directeur de banque ambitieux. Tout semble lui sourire puisqu’en plus de sa réussite sociale, il est marié à la belle Laura, une photographe de renom.
Leur union semble être au beau fixe puisque, de part et d’autre de la table d’un somptueux restaurant où ils viennent de dîner, ils sont capables de se déclarer leur amour.
Mais quelques minutes plus tard alors qu’elle est allée fumer devant l’établissement, Laura disparaît mystérieusement.
Pour quelle raisons, pendant qu’Antoine la recherche désespérément sous une pluie battante, elle se présente dégoulinante et méconnaissable chez Max, un petit garagiste de quartier ?
« Iris » est la quatrième film que réalise Jalil Lespert, comédien révélé chez Laurent Cantet dans « Ressources humaines » en 2000.
Après « 24 mesures » en 2006, il tourne l’adaptation d’un roman d’Olivier Adam « Des vents contraires » (deux films pas très aboutis mais personnels laissant augurer une carrière prometteuse) .
Mais en 2014, il revient là où on ne l’attendait pas, avec un biopic sur le couturier Yves Saint- Laurent qui remporte un large succès public et lui ouvre les portes de la cour des grands.
Après le succès d' » Yves Saint Laurent », on ne pouvait attendre qu’une œuvre ambitieuse allant avec les moyens dont il allait disposer pour réaliser à nouveau.
Et c’est « Iris » qui nous arrive, un thriller en chambre dont le déroulement, tout en méandres, se leste un peu plus à chaque articulation de mystère et d’ambiguïté.
Le premier souci de Jalil Lespert semble avoir été de réussir une mise en scène somptueuse dans des décors luxueux, avec des lumières savantes qui donnent des images parfois un peu vernissées.
Le second souci était peut-être de réaliser un thriller à « la Melville » sans course-poursuite, ni le moindre coup de feu, donnant l’avantage aux personnages qui, s’ils échappent parfois aux stéréotypes, restent à l’état de silhouettes à force d’application et de soin.
« Iris » qui est un remake de « Chaos » du japonais Hideo Nakale (1999) est un thriller psychologique qui prétend à un rythme haletant et à une forte orientation sulfureuse.
Sur le thème pas très neuf d’une kidnappée complice de son enlèvement avec partage de rançon à l’appui, le film de Jalil Lespert fluctue dans ses choix narratifs prioritaires, entre thriller et film à personnages. Il n’évite pas les clichés sur la nuit parisienne avec ses bars enfumés, ses clubs privés, ses prostituées et ses soirées bourgeoises sado-maso agrémentés ici de plans larges à la gloire de la ville lumière.
Si « Iris » apparaît comme un bel objet de cinéma, le savoir-faire de Jalil Lespert finit par se retourner contre lui quand trop de soin apporté à l’image, une grande application, privent le sujet de ce qu’il lui aurait fallu aussi de rugosité.
Le trop énigmatique solitaire et sombre Max (Romain Duris hermétique) lorgne du côté des personnages « à la Melville » quand Charlotte Le Bon dont on exploite la ligne parfaite, les traits du visage irréprochables lance, elle, un clin d’œil du côté des héroïnes hitchcockiennes ; en retour de quoi, elle est trop souvent réduite à un « personnage silhouette » malgré quelques prouesses de jeu spectaculaires.
« Iris » est une réalisation extrêmement soignée et d’un point de vue esthétique, virtuose. Mais sa construction parfois un peu trop « sinueuse » et une interprétation trop démonstrative parviennent ici et là, à entamer le plaisir.
Francis Dubois
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