A partir des écrits de l’écrivain noir américain, James Baldwin, Raoul Peck a réalisé un film qui fait état des luttes sociales et politiques des afro-américains au cours de ces dernières décennies.
Son propos est une analyse intime de la société américaine en écho à une réalité française actuelle.
Le narrateur du film est James Baldwin lui même et le texte est lu par Joey Starr dans la version française et par Samuel Jackson pour la version originale.
Le texte a été écrit en 1979, à une période particulièrement douloureuse de la situation raciale aux États-Unis, à la veille de l’élection de Ronald Reagan.
Trois leader de la lutte contre la discrimination raciale ont été assassinés en cinq ans.
Medgar Evens le 12 juin 1963.
Malcom X le 21 février 1965.
Martin-Luther King le 4 avril 1968.
James Baldwin est l’un des plus grands écrivains nord-américains de la seconde partie du XXème siècle et un critique de la société américaine.
Sorte de visionnaire, il a anticipé les tendances destructrices que nous constatons aujourd’hui dans l’ensemble du monde occidental et au-delà, tout en portant sur les situations dramatiques un regard d’espoir et de dignité.
Il a exploré les distinctions raciales, sexuelles et sociales et imaginé les tensions autour des questions d’identité, d’incertitudes, d’aspirations et de quêtes personnelles.
Il avait une grande compréhension de la politique, de l’histoire et de la condition humaine.
Il a été le porte parole de la communauté afro-américaine et le film restitue une grande partie de sa participation à des débats télévisés, de ses interventions dans des universités.
Le réalisateur a puisé dans les images d’archives et il a également inséré dans son film des extraits de productions cinématographiques comme cette version muette de « la case de l’oncle Tom » ou un extrait d’une comédie dans laquelle Doris Day et Rock Hudson évoluent dans une cuisine rutilante. Cette scène faisant contraste avec des images où des chiens attaquent des manifestants noirs qui sont refoulés d’un restaurant.
En documentant les combats de trois noms mémorables – Evers, King et Malcom – le film dresse le portrait de l’Amérique d’aujourd’hui et de ce qu’on nomme «le problème noir» dont Obama, en deux mandats, n’est pas venu à bout.
Comme dans la plupart de ses réalisations précédentes, Raoul Peck a voulu retourner à ses racines et tout remettre en question pour renouer avec la liberté et la subjectivité.
Il a puisé dans toutes les œuvres de Baldwin pour composer un texte original avec des mots qui ont été écrits il y a quarante ans et qui une résonance très actuelle.
C’est un film visuel et musical où les images servent de ponctuation aux mots et à la musique et vice et versa . Il est constitué d’images d’archives, d’extraits de films, de documentaires, d’interviews filmées, de débats télévisés et d’images contemporaines. Le montage kaléidoscopique et poétique rejoint le style des écrits de Baldwin.
Le film a été diffusé sur Arte qui l’a financé avant sa sortie dans les salles le 10 mai prochain.
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Francis Dubois
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