Egon Schiele est l’un des artistes comptant parmi les plus provocateurs de la Vienne du vingtième siècle, sa vie et son œuvre étant empreintes d’érotisme et du caractère éphémère des choses.
Ses tableaux font scandale et son choix de faire poser des enfants le conduisent face à la justice et à des condamnations.
Les femmes sont sa plus grande source d’inspiration. Deux d’entre elles compteront surtout : sa jeune sœur Gerti et Wally Neuzil qu’il immortalisera dans une œuvre intitulée «Mort et jeune fille» .
Cependant, lorsque la Première Guerre mondiale s’annonce et menace la pratique de son art, Schiele prendra la décision de «sacrifier» Wally qui, devenue infirmière sur le front, disparaîtra de sa vie mais demeurera sûrement son plus grand amour.
Egon Schiele fut un artiste phare pour la génération de Dieter Berner.
Bien que déçu par les films qui avaient été réalisés sur le peintre, la lecture du livre qu’Hilde Berger lui a consacré a laissé entrapercevoir au réalisateur une adaptation possible de la vie de l’artiste.
Il s’agissait de déterminer quels aspects de la vie de Schiele seraient les plus à même de faire comprendre le peintre, ses œuvres et ce qui l’a conduit à peindre.
La meilleure piste qui est apparue au réalisateur est celle de son rapport particulier à la sexualité et de ses relations peu conventionnelles avec ses modèles.
Dieter Berner appartient à la génération des années 68, celle qui cherchait une nouvelle manière de concevoir le monde, à prendre avec une plus grande liberté la succession de leurs parents qui avaient connu la guerre et qui se sentaient porteurs d’une sorte de mission pour effacer du mieux possible un tabou absolu.
Il s’agissait de créer de nouvelles valeurs et de nouveaux concepts de vie pour tourner le dos à un passé fasciste.
Deux sujets intéressaient plus particulièrement Schiele qui était un grand lecteur : la découverte de la sexualité grâce à Sigmund Freud ainsi que la folie, maladie dont était atteint son père.
Il nourrissait une véritable passion pour la femme, qu’il la désirât ou pas, et c’est ainsi que sa sœur Gerti fut la première à poser nue pour lui en dehors de l’Académie des beaux-arts.
Lorsqu’il épouse Edith, il se heurte à un problème. Non seulement sa femme refuse de poser nue pour lui mais elle lui interdit de peindre d’autres femmes nues. Lorsqu’elle s’y résigne finalement, elle lui demande de modifier les traits de son visage de façon à ne pas être reconnue car poser nue était réservé aux filles du peuple et était considéré comme une forme de prostitution.
Si le film de Dieter Berner est d’une facture classique, il échappe cependant au biopic traditionnel grâce à une distribution constituée de jeunes comédiens qui donnent au bout du compte, une fraîcheur générale en léger décalage avec le poids du sujet.
Et cette jeunesse des personnages, le fait que Gerti, une adolescente, constitue le socle du récit, donnent un relief particulier et une légèreté bienvenue aux thèmes que traite le film.
L’idée de recourir au flash-back dans la construction du film lui donne une sorte de respiration entre noirceur (la maladie de Schiele, le destin de Wally) et fraîcheur et légèreté, qui accompagne l’élan créatif du peintre.
Beaucoup découvriront un artiste qui aura laissé une œuvre considérable de peintures et de dessins. Chaque année près de quatre-cents mille personnes visitent le Musée Léopold pour admirer les chefs d’œuvre de Schiele, Klimt et Kokoschka …
Passionnant.
Francis Dubois
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