En 1973, l’Uruguay bascule dans la dictature. Des opposants politiques sont secrètement emprisonnés par le nouveau pouvoir militaire.

Le film de Alvaro Brechner s’attache aux terribles conditions d’internement de trois d’entre eux : José Mulica, un guérillero des Tupamaros dans les années 60-70, Mauricio Rosencof journaliste, dramaturge poète et écrivain uruguayen qui fit partie de la direction des Tupamaros et Eleuretio Fernandez Huidodro, ex-dirigeant des Tupamaros et sénateur uruguayen qui le resta jusqu’à sa mort en 2016.

Le mouvement Tupamaros émerge au début des années 60 alors que la situation politique du pays est entre les mains de deux partis traditionnels de droite et qu’aux élections de 1962 les deux rassemblements marqués à gauche n’obtiennent à eux deux que 6% des voix.

C’est dans un contexte de grande violence où des groupes d’extrême droite attaquent les locaux universitaires, les permanences du Parti communiste et assassinent certains de leurs membres, que se crée une structure clandestine armée pour se préparer à un éventuel putsch. La dimension défensive des Tupamaros est ensuite vite remplacée par un idéal révolutionnaire.

Cinéma : Companeros
Cinéma : Companeros

En 1971, à la suite d’élections corrompues avec le soutien des États-Unis de Nixon, le Président Juan Maria Bordaberry est élu. Il devient le premier dictateur de l’Uruguay. C’est alors, après une confrontation sanglante entre pouvoir et Tupamaros que les opposants au régime sont défaits et que commence dans des conditions inhumaines la détentions de ceux, hommes et femmes, qui ont résisté.

L’Uruguay s’allie à d’autres dictatures sud-américaines et l’Opération Condor avec le soutien des États-Unis lance une offensive internationale d’assassinats et de lutte anti guérilla ayant pour but de poursuivre partout et jusqu’en Europe les dissidents politiques de gauche.

« Companeros  » répond à la question « Que reste-t-il d’un homme lorsqu’on lui enlève tout ? Que coupé du monde, du temps, de tout élan, du moindre élément matériel auquel s’accrocher, il en arrive à âtre trahi par ses propres sens. »

Le film d’Alvaro Brechner est un long voyage vers les ténèbres, l’épreuve totalement inhumaine de dégradation mentale et physique qu’ont traversée douze années durant, au quotidien, des hommes qui ont dû se réinventer à partir des vestiges de leur condition humaine.

Au delà d’une méticuleuse reconstitution historique des faits, le film fait ressentir sur le plan esthétique et sensoriel l’expérience de la survie et de la lutte intérieure que mènent les trois personnages.

La mise en scène a été conçue pour plonger le spectateur à leurs côtés dans le combat pour la conservation de leur humanité.

L’acharnement cruel sur les trois dissidents donne lieu à des séquences et scènes parfois difficiles à soutenir et qui vont au-delà des limites de la cruauté.

Mais faut-il pour autant fermer les yeux sur une réalité ?

Francis Dubois


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