« Comme des lions  » raconte les deux années de lutte des salariés de PSA Aulnay contre la fermeture de leur usine qui, en 2013 employait plus de 3000 personnes dont 400 intérimaires.

Des immigrés, des enfants d’immigrés, des militants, des syndicalistes rodés à la défense des droits des ouvriers se sont retrouvés côte à côte pour tenter de faire front, face au « mur du profit », au mouvement de spirale des « dés pipés »..

Si leur engagement s’est soldé par un échec, les salariés ont au moins eu le temps de mettre à jour, les stratégies et les mensonges de la direction, les faux prétextes, la langue de bois, la démagogie, les promesses sans garantie et les raisons de la faiblesse de l’état.

Cinéma : Comme des lions
Cinéma : Comme des lions

Au même titre que les usines Renault de Billancourt ou de Vilvoorde, le site d’Aulnay créé en 1973 a représenté durant plusieurs décennies, la réussite de l’automobile française et fut un des plus importants employeurs de la région parisienne.

Il a été aussi le théâtre de nombreux conflits sociaux : en mai-juin 1982 notamment pour un premier grand mouvement de grève mené par les ouvriers immigrés qui représentaient 50% de la main d’œuvre.

Une embellie se situe en 2004, quand les usines connaissent un record de production de 418 000 véhicules.

En 2005 et en 2008, se produisent deux nouveaux conflits dont le souvenir de lutte et d’organisation vont jouer un grand rôle dans l’état d’esprit des travailleurs en 2012.

En lice, des syndicalistes qui veulent convaincre des salariés doutant de l’efficacité d’une action, un État qui veut réindustrialiser sans avoir les commandes de son industrie, des industriels qui croient aux indicateurs de rentabilité mais dont la logique n’est pas industrielle mais financière. Des médias qui, pour certains d’entre eux, relaient la stratégie de la direction en donnant l’image d’une lutte violente menée par les salariés.

La réalisatrice, dans un souci d’objectivité souhaitait que témoignent les trois forces en présence : Les ouvriers, la direction et l’État.

Elle souhaitait donner à voir les trois stratégies mais autant le gouvernement que la direction qui ne sont pas dans le même rapport à la vérité que les ouvriers, se sont esquivés.

L’État et la direction sont restés dans une opacité qui était une forme de réponse révélatrice.

Françoise Davisse n’était admise dans les locaux de l’usine que lorsque celle-ci était occupée par les grévistes. Elle a ainsi pu suivre toutes les discussions, les actions, les prises de décisions et jamais personne ne lui a demandé de couper sa caméra, lorsque des différends entre grévistes pouvaient donner des face à face enflammés et discordants.

Elle a pu filmer l’euphorie, le « désir d’y aller », l’énergie de tous ceux qui s’étaient franchement engagés, le malaise des tièdes et des hésitants mais elle a sans doute aussi rendu compte des limites d’une action revendicative dans le monde agonisant de l’industrie, du pouvoir amputé d’un syndicalisme tout aussi agonisant.

Ni l’énergie ni les convictions ne font défaut et pourtant, les circonstances et les nouvelles données font que les revendications, peut-être parce que chacun sait déjà qu’elles sont vouées à l’échec, sonnent creux.

Le film, en tous points remarquable, aura-t-il bientôt valeur de document, de trace, du vestige de ce que furent (autrefois !) les actions d’ouvriers ?

Francis Dubois


Bienvenue sur le blog Culture du SNES-FSU.

Des militants partagent ici des critiques littéraires, musicales, cinématographiques ou encore des échos des dernières expositions mais aussi des informations sur les mobilisations des professionnels du secteur artistique.

Des remarques, des suggestions ? Contactez nous à culture@snes.edu