Pauline est infirmière à domicile dans une petite ville du Nord, entre Lens et Lille.

Sorte de Mère Courage, elle élève seule ses deux jeunes enfants et s’occupe quotidiennement de son père malade.

Dévouée, généreuse, enthousiaste, elle est très appréciée de ses patients à qui elle trouve le temps et l’énergie d’apporter soutien et réconfort à chacune de ses visites.

Sa grande popularité donne à un notable de la ville, membre influent d’un parti d’extrême droite, de proposer à Pauline d’être tête de liste pour les prochaines municipales.

Bien qu’étant la fille d’un ouvrier métallurgiste communiste, elle n’a jamais montré beaucoup d’intérêt pour la chose politique.

Or, c’est en partie ce que recherche le «recruteur», un médecin qui connaît bien Pauline, qui a soigné sa mère autrefois et s’occupe actuellement de son père.

Si Pauline est novice en politique, elle sera d’autant plus malléable et on pourra d’autant mieux lui faire intégrer un discours de façade, allant dans le sens de la générosité d’une jeune femme que son métier confronte à la précarité et à la misère.

Cinéma : Chez nous
Cinéma : Chez nous

Lucas Belvaux, dans son film courageux, dresse le tracé d’une manipulation.

La proposition de figurer en tête de liste en vue de prochaines élections municipales, si elle effraie Pauline dans un premier temps, va très vite la flatter.

D’autant qu’elle émane d’un notable, médecin en ville, qu’elle connaît de deux sources : comme un personnage de bonne réputation qu’elle côtoie dans le cadre de son travail et comme celui qui a soigné sa mère quand elle était atteinte d’un cancer.

L’homme se présente à Pauline sous son aspect le plus rassurant, comme celui qui l’épaulera au cours de la campagne.

Pauline finit par mordre à l’hameçon quand elle rencontre Agnès Dorgelle, la responsable nationale du parti d’extrême droite dont le côté racoleur et démagogique du discours échappe à la jeune femme peu rompue au langage politique et à plus forte raison, au double langage politique.

C’est sur ces entrefaites que Pauline croise le chemin de Stéphane dit Stanko, un amour de jeunesse, apprenti boxeur dont elle ignore qu’il fut, après des années dans l’armée, utilisé par le parti d’extrême droite dans un commando qui avait pour mission de « casser de l’étranger »au cours d’opérations musclées.

Mais en période électorale, le parti d’Agnès Dorgelle, soucieux de fournir une image adoucie de ses pratiques, voit d’un mauvais œil la romance qui lie Pauline à quelqu’un qui, dorénavant, est devenu gênant sur «le portrait de famille» du parti.

Lucas Belvaux, avec la complicité de Jérôme Leroy auteur d’un ouvrage dont le film s’inspire, a tissé un scénario qui masque à peine les pratiques du Front national et déguise tout juste le personnage de sa dirigeante dont Agnès Dorgelle est une sorte d’écho.

Grâce à un casting ciselé et à la peinture de Nord de la France auquel il est attaché au point d’y avoir déjà situé plusieurs de ses films, il réalise une œuvre efficace qui vise le grand public, dans la dénonciation d’un parti qui fonctionne sur une vitrine rassurante pour mieux masquer ses intentions profondes.

Dès les projections en salles de la bande-annonce de « Chez nous » certains membres du front national on protesté au fait de voir projetés sur les écrans, en pleine période de campagne présidentielle, un film qui dénonce, de façon à peine masquée, les pratiques de leur parti.

Cela prouve deux choses ; que le courage du réalisateur et citoyen Lucas Belvaux, sa sincérité et son engagement font mouche et, dans un second temps, que le cinéma a aussi et encore, et c’est tant mieux, son mot à dire…

Francis Dubois


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