Camille Lepage, une jeune photojournaliste passionnée par ce que sera le métier qu’elle a choisi, décide de partir en Centrafrique couvrir la guerre civile qui se prépare. Les recommandations de prudence que distille sa famille et la promesse de Camille de ne pas prendre de risques sont précautions inutiles quand on sait les audaces et les prises de risques qui sont inhérentes à ces missions et dont est capable la jeune fille qu’est Camille Lepage encore novice mais passionnée et déterminée. Une fois sur place et dans le feu de l’action, Camille se passionne pour ce pays où désormais, elle sait peut-être que son destin se jouera.
Lorsque Camille Lepage arrive à Bangui en octobre 2013, le pays bascule dans la guerre civile. La Seleka, une coalition de groupes rebelles majoritairement musulmans, a pris le pouvoir par les armes. Pillages et assassinats se multiplient en ville pendant que dans les campagnes, les villages brûlent, obligeant les populations à se réfugier dans la brousse. En réaction, des villageois se constituent en milices d’autodéfense, les anti-balaka, ainsi nommées à cause de leur grigris censés les protéger des balles des kalachnikovs. En décembre, tout bascule. Les anti-balaka attaquent Bangui. Ils sont repoussés par les Seleka qui se déchaînent contre la population civile. L’intervention française n’empêchera pas une population chrétienne assoiffée de vengeance, de se retourner contre la communauté musulmane.
Camille Lepage a photographié tout cela. L’irruption de la violence, la tragédie, la folie meurtrière, la mort. Elle revient épuisée dans sa famille pour les fêtes de fin d’année mais ne se résout pas à abandonner le Centrafrique. Elle y retourne en janvier 2014.
Alors que la plupart des journalistes quittent le pays, elle cherche le moyen de travailler plus en profondeur et pour cela, noue des liens avec les anti-balaka dont elle souhaite vivre l’engagement de l’intérieur. Elle rencontre un chef anti-balaka, Rocka Mokom qui accepte qu’elle l’accompagne dans ses patrouilles à la frontière de Cameroun.
C’est là qu’au cours d’une embuscade, Camille trouvera la mort à vingt six ans.
On pourrait dire que Nina Meurisse incarne superbement Camille Lepage mais pour être plus précis, on peut dire qu’elle EST Camille Lepage. Elle est la jeune journaliste tant il est immédiatement lisible qu’elle s’est complètement impliquée, qu’elle s’est laissée immerger par son personnage pour trouver une superposition, une ressemblance, une intimité parfaites.
« Camille » n’est pas un biopic au sens ordinaire. « Camille » est un récit d’initiation, l’histoire d’une jeune fille idéaliste qui avait décidé à égalité d’être une photojournaliste reconnue et de mettre en lumière la réalité d’un conflit tellement meurtrier.
La réalisation discrète laisse toute sa place au personnage, au jeu sensible de Nina Meurisse et les images du conflit apparaissent le plus souvent sous le forme des photos, un choix qui détourne de tout voyeurisme et qui, bien plus que des images animées, relatent l’ampleur et la violence du conflit.
Superbe film.
Francis Dubois
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