Benni est une fillette de dix ans enfermée depuis sa petite enfance dans un état d’ instabilité, une suractivité permanente et des accès de violence qu’elle ne parvient pas à contenir. Prise en charge depuis son tout jeune âge par les services sociaux, elle est allée d’établissement en établissement sans résultats. Elle n’aspire pourtant qu’à une stabilité affective, à être protégée et retrouver l’amour paternel qui lui a fait défaut et dont le manque la tourmente.

Dans le nouveau foyer où elle a été inscrite, madame Bafané assistante sociale et Michael Heller dit Micha, éducateur, vont tenter une nouvelle démarche éducative pour panser les blessures de Benni et l’aider à trouver une place dans le monde.

Cinéma : Benni
Cinéma : Benni

Nora Fingscheidt avait depuis longtemps pour projet de réaliser un film sur une petite fille sauvage, un personnage selon elle, traité trop rarement au cinéma.

Alors qu’elle tournait un documentaire, elle a eu l’occasion de rencontrer une adolescente de 14ans qui avait été placée, faute d’autres solutions, dans un centre d’hébergement pour femmes.

Comment une enfant de cet âge pouvait-elle se retrouver là ? Les recherches d’une réponse ont servi de déclic à la réalisatrice. Pendant les années au cours desquelles elle a fait des séjours dans diverses institutions, elle a collecté un grand nombre d’éléments pour nourrir son sujet.

Le personnage de Benni est le résultat de plusieurs rencontres, elle est le fruit de la découverte de cas d’une grande souffrance due généralement au départ, à une lourde carence affective aggravée par des passages répétés de centre en centre qui n’ont eu pour résultat que d’ajouter à l’instabilité lourdement présente.

Il y a deux façons de recevoir le film de Nora Fingscheidt. On peut y voir une belle histoire, généreuse, bourrée d’humanité. Celle de la rencontre entre un adulte qu’apparemment la vie n’a pas ménagé et une enfant qui trouve dans la présence de cet homme à fois fragile et charismatique, l’affection parentale qu’elle recherchait.

Le rapprochement entre les deux protagonistes est un long chemin semé d’embûches, autant d’obstacles qui seront franchis même si ce père que Benni recherche ne peut être assumé par Micha, d’une part parce qu’il est déjà père et d’autre part parce que dans sa mission, un éducateur doit trouver le bon équilibre entre l’affectif et les limites qu’impose la démarche professionnelle.

Vue de ce point de vue, l’histoire de Micha et Benni est un joli conte, une très belle expérience d’humanité. Un plaisir qui est intensifié par la présence de deux comédiens remarquables : Albrecht Schuch l’interprète de Micha, un personnage solide qui laisse filtrer des blessures passées et Helena Zengel qui incarne une étonnante Benni. C’est à la fois une forte présence et un monument de fêlures accumulées. Touchante et révoltante elle nous fait vivre, à travers son instabilité, des moments d’apaisement et de débordements spectaculaires.

Mais si on sort d’une sorte d’angélisme, le récit est confronté à une autre réalité. Le fait que Micha puisse se retrouver seul dans un lieu isolé. Il est, par ailleurs difficile d’imaginer la mise en place de cette sorte d’expérience éducative quand on connaît (mais peut-être l’Allemagne est-elle mieux lotie en effectifs d’encadrement) la pénurie de plus en plus grande de personnel dans les établissements qui prennent en charge ce type de cas sociaux.

Un beau film chaleureux, magnifiquement interprété mais sans doute un peu trompeur sur le fond.

Francis Dubois


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