L’Aviron Bayonnais Rugby est entré au Top 14 sur les chapeaux de roue, entraîné par le coach charismatique Vincent Etcheto. Mais l’équipe des rugbymen se retrouve au bas du classement dès le mois d’octobre 2016 et c’est à ce moment là que Delphine Gleize, documentariste, les rencontre.
Le maintien au Top 14 est alors devenu une obsession pour l’équipe et pour son entraîneur.
La cinéaste va les suivre et les filmer d’une camera discrète au quotidien pendant sept mois.
Dephine Gleize aime le rugby depuis l’enfance, l’époque où tous les dimanches, elle allait voir son père disputer des matchs et sa manière de filmer les membres de l’équipe de l’Aviron Bayonnais le montre bien, à la fois respectueuse et tendre.
Et c’est un peu par hasard, grâce à un curieux concours de circonstances, qu’elle a eu l’opportunité de croiser Vincent Etcheto et qu’elle lui a demandé s’il accepterait qu’elle vienne filmer l’équipe.
Delphine Gleize a été d’autant plus convaincue qu’il fallait qu’elle fasse le film avec l’Aviron Bayonnais qu’ils acceptaient un regard de cinéaste alors qu’ils traversaient un épisode peu flatteur et n’étaient pas au meilleur de leur forme professionnelle.
Les choses ont été définies dès le début du tournage : la cinéaste ne serait pas intrusive et ne serait pas la copine de l’équipe.
Elle s’est même interdit d’entrer dans les vestiaires jusqu’au jour où la proposition est venue naturellement et que ce sont les joueurs eux-mêmes qui l’y ont invitée.
Delphine Gleize a filmé seule, sans aucune équipe, et c’est sans doute ce choix qui a facilité sa lente intégration au sein du groupe à une période où l’équipe sortait perdante de presque tous les matchs.
Mais c’est sans doute aussi ce regard posé sur eux à un moment critique qui leur a été bénéfique dans la mesure où il leur a évité de se défiler, et au contraire, de se regarder dans cette sorte de miroir qu’était le tournage et dans la mesure où le film serait achevé.
Tous les films qu’a réalisés Delphine Gleize parlent de la même chose : « Comment on tient debout dans l’épreuve? » et « Beau joueur » ne déroge pas à la règle en rendant compte à travers la traversée d’une zone de turbulences d’une équipe sportive, d’une histoire de corps et de cœurs cassés.
« Beau joueur » n’est pas un film sur une équipe de sport mais sur une bande de gars solides qui souffrent et qui espèrent ensemble.
C’est un film tourné pendant une descente aux enfers mais qui, lorsqu’il s’achève, les retrouve à un retour aux victoires.
C’est un film sur l’utopie, sur ces hommes mus par le désir de revivre la joie intense qu’ils ont éprouvée à un moment de leur vie et dont il ont perdu le goût, un eldorado avec lequel il veulent renouer.
« Beau joueur » fonctionne sur un suspense avec des moments de détente et de relâchement avant de retomber dans le « thriller ».
La camera de Delphine Gleize est amicale, affectueuse, tendre. Elle effleure les joueurs avec amitié et les surprend dans leur fragilité de « géants perdants ».
On peut ne rien connaître au rugby, ne jamais s’y être intéressé et se laisser porter par ce bel hommage à la modestie, ce film attachant de bout en bout.
Francis Dubois
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