En 2016, Kleber Mendonça Filho présentait à Cannes «  Aquarius  » et brandissait avec son équipe, des pancartes dénonçant ce qu’ils considéraient comme un coup d’État contre la présidente Dilma Rousseff. Cette année, il est venu présenter, toujours à Cannes, «  Bacurau » , son troisième long métrage coréalisé avec son directeur artistique Juliano Dornelles.

Cinéma : Bacurau
Cinéma : Bacurau

L’action se passe « dans quelques années ».

Les habitants de Bacurau, village imaginaire du Sertão brésilien, vivent une existence tranquille perturbée seulement par la visite du politicien local qui leur apporte de la nourriture avariée, des médicaments aux effets secondaires dévastateurs et des livres déversés comme des ordures du camion benne, tout en asséchant les rivières et privant progressivement le village d’eau.

Dès qu’un intrus arrive à l’entrée du village, les habitants sont prévenus et peuvent se cacher offrant ainsi l’image d’un village abandonné.

Pourtant, peu de jours après l’enterrement de la matriarche, des phénomènes étranges vont commencer à se produire : le village n’apparaît subitement plus sur les cartes, les communications sont coupées, une soucoupe volante survole les alentours du village et la mort rôde !

Construit comme un western (une communauté paysanne subit l’assaut d’une bande de mercenaires désirant les exterminer) le film lui instille des éléments de culture populaire (le personnage de Lugan est un lointain descendant des Cangaceiros et du cinéma de Glauber Rocha), du cinéma de genre (le survival, le néo western) avec des clins d’œil cinéphiles à John Boorman, Howard Hawks ou John Carpenter.

Parmi les acteurs, tous remarquables, on notera les performances de Sonia Braga qui tenait déjà le rôle principal dans « Aquarius  », d’Udo Kier dans le rôle du « méchant » et surtout celle de Silvero Pereira délicat justicier qui avec ses doigts ornés de bagues et des poignets de bracelets, est resté maître dans l’art de la machette.

Bien qu’écrit et réalisé avant l’arrivée au pouvoir de Bolsonaro, la réalité finit par rattraper la fiction. Comment ne pas voir dans la destination à venir de ce village, au mieux un lieu de passage pour touristes en recherche d’exotisme, au pire un lieu sans loi où des étrangers pourraient donner libre court en toute impunité à leurs démons.

Ne reste plus alors, comme le montre la une d’un journal affiché dans le musée de Bacurau, que la résistance, la lutte et son assortiment de violence.

Francis Dubois


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