Frappée de plein fouet par la crise économique de 2008, l’Espagne a vu son taux de chômage atteindre les 27 % en 2012.
Des centaines de milliers de personnes se sont alors retrouvées sur le flanc, dans l’impossibilité de faire face à des crédits bancaires le plus souvent contractés pour l’achat d’un logement.
Des familles ont été alors expulsées de leurs habitations tout en restant endettées auprès de leur banque.
A Barcelone, une collectif citoyen, apolitique et spontané, a vu le jour pour proposer une aide aux victimes de prêts toxiques, des hommes et des femmes de tous horizons n’ayant jamais connu l’endettement et du coup d’autant plus dépourvus de se retrouver du jour au lendemain à la fois sans emploi et sans toit.
Atteints par la honte et l’incompréhension où les ont plongés des situations auxquelles ils n’étaient pas préparés, ils vont trouver auprès des membres du collectif entraide et solidarité et voir parfois se profiler des solutions d’urgence à leurs difficultés.
Le film de Silvia Munt est constitué dans un premier temps des témoignages que des personnes confrontées à des situations toutes aussi dramatiques les unes que les autres livrent aux responsables du collectif citoyen, autant qu’à ceux qui, comme eux, sont venus chercher une écoute, un soutien et parfois une ébauche de solution et des raisons d’espérer.
Le film se construit au fil des réunions où réapparaissent les mêmes personnes à chaque séance, de sorte que s’établit, avec l’évolution des situations, une vraie trame dramatique.
Et la moindre lueur d’espoir, une solution qui s’annonce fut-elle fragile, provisoire, est vécue par l’ensemble des adhérents du collectif comme une victoire, avec un enthousiasme à la fois réjouissant et pathétique.
Le film de Silvia Munt est un témoignage intime sur la situation sociale en Espagne. Il donne à voir la fragilité des personnes touchées par la crise et fait entendre leur voix.
Il est centré sur le parcours de familles et d’individus, sur les souffrances, les humiliations, les batailles, les défaites et parfois les victoires.
Chacun, dans un élan de survie, découvre face à l’échéance, une force qu’il ne soupçonnait pas, quelque chose de profondément révolutionnaire mais surtout la joie de se retrouver avec d’autres sur l’essentiel, de pouvoir faire preuve de solidarité, de générosité même quand il ne dispose plus de rien.
Ensemble, ils échappent à une réalité sociale écrasante et redonnent dignité à des individus mis à terre, démolis psychologiquement et socialement.
Dans la dernière partie, le film rend compte des bonnes nouvelles qui sont survenues et ont remis sur le rail certains individus qui avaient touché le fond.
« Affectados » s’achève sur des notes optimistes, sur l’espoir retrouvé, sur le bonheur de triompher ne fut-ce que provisoirement, sur les petits plaisirs qui se croquent à pleines dents.
Un triste bilan social mais paradoxalement, un film plein de chaleur humaine et bourré d’optimisme.
Francis Dubois
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