Au début des années 90, le sida tue depuis maintenant dix ans.

Les militants d’Act-Up Paris multiplient les actions spectaculaires pour lutter contre l’indifférence générale et pour pousser les gouvernants à s’engager, notamment pour lancer une vraie politique d’information.

Nouveau venu dans le groupe, Nathan est bouleversé par la radicalité de Sean qui en est à un stade avancé de la maladie mais qui fait preuve d’un solide optimisme et en tant que militant d’une grande énergie.

Cinéma : 120 battements par minute
Cinéma : 120 battements par minute

Robin Campillo a rejoint Act-Up en 1992. Comme beaucoup de gays, il a vécu la décennie 80 dans la peur de la maladie. C’est en écoutant Didier Lestrade, l’un des fondateurs de l’association, au cours d’une interview télévisée qui parle de «communauté Sida» composée de malades, de leurs proches et de personnel médical qu’il décide de rentrer à Act-Up.

Alors que les gays vivaient la période la plus dure de l’épidémie, ils devenaient les acteurs de la lutte. Ils étaient formés à la maladie, à la technicité des discours médicaux et politiques, dans un travail collectif.

A l’époque, l’homophobie était encore la norme et parler de distributeurs de préservatifs dans les lycées ou plaider contre l’échange de seringues chez les usagers de drogue restaient des sujets tabous.

Le film est une fiction même si Robin Campillo et Philippe Mangeot, ancien membre d’Act-Up qui a participé à l’écriture du scénario, ont reconstitué beaucoup de débats et d’actions qui ont eu lieu à l’époque et si on peut reconnaître au cours de la projection, des traits de caractère de personnalités qui ont marqué l’histoire du groupe.

Entre l’histoire du film et aujourd’hui, il s’est passé un quart de siècle et «120 battements par minute» explore cet écart et si les traitements ont évolués et sont moins contraignants, les gays n’en ont pas pour autant fini avec le sida.

Et l’époque où se situe le film on ne connaissait ni le téléphone portable, ni internet, ni les réseaux sociaux et la télévision avait une place centrale.

Les malades d’Act-Up vivaient leur propre maladie et ils la représentaient en même temps. Ils jouaient la colère mais à un stade plus avancé de la maladie, la colère devenait réelle.

C’est le cas de Sean dans le film. Après avoir montré une force qui paraissait à toute épreuve, la représentation lui devient scandaleuse et à un stade avancé de sa maladie, il retourne à la solitude que le groupe lui avait permis de dépasser.

Le film de Robin Campillo montre une autre dimension du collectif : celle de la famille.

La famille biologique représentée par la mère de Sean (magnifique personnage), celle qui accompagne son jeune fils aux réunions et la famille choisie, incarnée par le collectif qui prend toute sa vérité dans la scène finale au cours de laquelle les deux se mélangent…

«120 battements par minute» mêle avec une grande fluidité le documentaire poussé jusqu’aux explications médicales sur la maladie et le récit intimiste. Tous les personnages existent complètement servis par des interprètes remarquables d’authenticité. Ils sont tous à saluer avec peut-être une mention spéciale à Adèle Haenel qui se fond complètement dans le groupe…

Le sida menace toujours. Le film est magnifique pour revenir sur cette période où la maladie a fait tant de victimes….

Francis Dubois


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