La saison actuelle de l’Opéra Grand Avignon s’intitule Mythes. Après un Orfeo de Monteverdi dans une mise en scène de Frédéric Roels, directeur de la maison d’opéra avignonnaise, dans lequel la beauté rivalisait avec la simplicité, c’est au tour du Ballet de l’Opéra d’Avignon dirigé par le chorégraphe Martin Harriague, de nous proposer un Prométhée inspiré de l’unique ballet que Beethoven composa en 1801, Les Créatures de Prométhée. Commandée au musicien par le chorégraphe Salvatore Viganò, l’œuvre célèbre les idées humanistes de Beethoven, les Lumières et les figures mythologiques porteuses de progrès. Fabien Cali, compositeur à la croisée des genres et des esthétiques, actuellement en résidence à l’Orchestre national Avignon-Provence, vient augmenter la partition de Beethoven par des prolongements musicaux véritablement en fusion avec l’écriture musicale originelle. Une opération qui pourrait surprendre mais aussi ravir les plus fervents amateurs de Beethoven. La chorégraphie de Martin Harriague liant intimement mouvements et sons, trouve-là un écho fusionnel. Ce Prométhée s’annonce comme une œuvre totale et prometteuse, pleine de surprises y compris dans le rapport orchestre-ballet, une pièce classique, héritée mais renouvelée. Les hybridations peuvent donner lieu à des êtres plus forts et plus beaux !
En un sens, le mythe de Prométhée appelle la modernité et le renouvellement. Figure emblématique de la ruse, de la rébellion et du progrès, ce Titan se porta au secours de son frère Épiméthée qui ayant pour tâche de distribuer aux créatures vivantes les moyens de leur survie, ne trouva plus rien à donner aux humains du fait de son imprévoyance. Prométhée dont « l’intelligence sait anticiper », comme le suggère son nom, eut l’audace de voler aux Dieux le feu sacré, moyen de la métallurgie et symbole de la connaissance technique. Par cet acte rebelle et transgressif, le mythe inscrit l’humanité dans la légende d’une espèce au-dessus des autres, apte à inventer ses propres moyens de survie, autant dire dans une logique émancipatrice vis-à-vis des Dieux et de la Nature… Tant pis pour les premiers, mais le rapport à la seconde est à repenser aujourd’hui. Le numérique ayant remplacé la métallurgie comme technique innovante, le feu humain est désormais surtout celui des armes et de la guerre mais ce n’est pas dans la nature de la technique de détruire, tout dépend des choix de son usage.
Nous qui préférons les feux de la rampes à ceux dévastateurs de forêts en surchauffe ou à celui meurtrier des canons, nous nous réjouissons de retrouver un Prométhée sublimé par l’art, une figure flamboyante entre corps dansants et sons musiqués !
Direction musicale Swann van Rechem
Chorégraphie Martin Harriague en collaboration avec les danseurs
Mise en scène, décor, lumières Martin Harriague
Dramaturgie Claire Manjarres & Martin Harriague
Costumes Mieke Kockelkorn
Danseur.euse.s, en personnages et créatures : Daniele Badagliacca, Sylvain Bouvier (Zeus et Épiméthée), Lucie-Mei Chuzel, Elisa Cloza, Aurélie Garros, Evan Inguanez (Épiméthée), Léo Khebizi, Hanae Kunimoto, Tabatha Longdoz, Kyril Matantsau (Prométhée), Ari Soto, Giorgia Talami
Une création mondiale en coproduction Opéra Grand Avignon & Orchestre national Avignon-Provence
(Sur la photo de gauche à droite : Frédéric Roels, Fabien Cali, Martin Harriague et Alexis Labat, directeur de l’ONAP)
Jean-Pierre Haddad
Opéra Grand Avignon, Place de l’Horloge, 84000 Avignon. Vendredi 12 et samedi 13 décembre 2025 à 20h00. Informations et réservations : https://www.operagrandavignon.fr/promethee
Le public du samedi 13 décembre est invité à poursuivre la soirée au Grand Foyer de l’Opéra transformé en dancefloor. Aux platines, le Dj Pierre Grieu qui a l’art de mélanger des tracks inconnus du grand public avec de grands tubes discos.
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