
La compagnie de danse et de théâtre belge Peeping Tom créée par Gabriela Carrizo et Franck Chartier en 2000 nous entraîne dans un monde onirique et inquiétant. Dans un décor hyperréaliste, des personnages semblent vivre des situations qui réveillent chez le spectateur désirs, peurs, cauchemars.
Diptych est l’assemblage de deux pièces destinées au Nederland Dans Theater en 2013 et 2015. On plonge « dans les méandres des pensées de personnages qui évoluent sur le pont d’un bateau ». Dans la première partie on est dans un salon vert. Un corps est à terre, un homme passe une serpillière qui se tâche de rouge, un peu plus tard une femme reste une jambe à la verticale une chaussure au pied, comme un pantin désarticulé, plus tard une autre sera portée comme une poupée de chiffon, pieds traînant par terre. Des hommes cherchent à ouvrir des portes sans y parvenir, ouvrent des penderies vides qui d’un coup révèlent des vêtements puis un tas de corps qui tombent. Une porte s’ouvre brutalement comme sous l’effet d’une bourrasque violente qui emporte tous les danseurs. Amplifiée par des effets sonores mystérieux, on a l’impression d’une menace sournoise. On pense à une scène de crime. Le second chapitre s’ouvre sur une chambre couverte de boiseries avec un très grand lit. L’installation se fait par le travail de tous, interprètes et techniciens. On retrouve le climat inquiétant de la première partie, une femme est poussée dehors sur ce qu’on imagine être la rambarde du bateau et, sous la pluie et la neige, tente désespérément de se faire ouvrir la porte, une autre passe avec un bébé. L’impression de violence faite aux femmes augmente.
Ces fictions renvoient au théâtre ou au cinéma, les deux chorégraphes citent dans leurs sources d’inspiration Shohei Imamura et Satyajit Ray. On pense aussi à David Lynch avec ces personnages comme perdus dans les labyrinthes de la mémoire. Mais par-dessus tout on est dans un spectacle de danse avec des danseurs qui chavirent, se laissent emporter par une danse frénétique et follement acrobatique qui laisse le spectateur sidéré au bord du gouffre de l’inconscient.
Micheline Rousselet
Jusqu’au 14 septembre au Théâtre du Rond-Point, 2bis, avenue Franklin D. Roosevelt, 75008 Paris – du mercredi au vendredi à 21h, le samedi à 20h, le dimanche à 15h – Réservations : 01 44 95 98 21 ou theatredurondpoint.fr
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