Comment continuer à vivre quand on est une jeune écrivaine qui apprend brusquement qu’elle a un cancer. Bien sûr il y a Lui, qui l’aime et veut l’aider à traverser la nuit de la maladie. Elle a peur de mourir, elle veut partir. Il l’emmène à la campagne, lui dit le nom des fleurs, lui raconte ses histoires de tournées, de décors. Elle lui dit qu’à quatorze ans sa copine l’avait mariée à Jeff Buckley, Kurt Cobain étant déjà pris par la fameuse copine ! Elle ressort ses disques de rock, écrit au milieu des prés, attend un message de son éditeur. Ils s’inventent un retour à la nature et s’aiment pour rester vivants.

L’autrice Lola Molina et le metteur en scène Lélio Plotton avaient déjà travaillé ensemble pour Seasonal Affective Disorder, lauréat du Prix Lucernaire-Laurent Terzieff-Pascale Boysson. On retrouve à nouveau deux jeunes amants, baignant dans la culture rock et fous d’amour. Mais cette fois, la tragédie naît de la maladie. Le texte de Lola Molina nous entraîne dans la tête de la jeune femme. Elle dit « je veux que tu me parles de tout, je veux qu’on mette des bougies par terre… Tu es très beau ». Elle répète avec froideur les mots du médecin mais la peur l’envahit juste après et ne la quitte plus. Mais le texte ne s’enlise pas dans le pathos de la maladie, il est vivant, actuel. Elle dit « tu me fais rire », il répond « tu me fais bander ». Elle parle de son travail d’écriture, de ses espoirs d’artiste. Et le texte offre aussi de belles échappées poétiques.

La scénographie apporte une note poignante en épousant le monde sauvage où les deux jeunes amants cherchent refuge. La scène est entièrement couverte de bouquets d’herbes et de fleurs des champs disposés dans des bouteilles de plastique. Les acteurs font et défont ces bouquets d’herbes folles. Lui en rapporte des brassées pour lui plaire que dans un moment de rage contre l’injustice du destin, elle renverse à coups de pied. Trois panneaux verticaux supportent des vidéos qui apportent un prolongement à cette nature tour à tour apaisante ou inquiétante.

Charlotte Ligneau se compose une silhouette d’adolescente farouche, pieds nus avec son sweat à capuche. Elle a la sensibilité d’une écorchée vive. Le désir amoureux l’enflamme et la terreur de la mort la saisit. Elle passe de la douceur à la rage, des détails du quotidien à ses sentiments. Elle illumine la scène au milieu des fleurs, elle flambe, elle se consume. Antoine Sastre avec sa chemise de bûcheron répond à ses désirs, attentif, amoureux, discret. Tous deux donnent beaucoup de force à ce duo amoureux.  
Micheline Rousselet

Spectacle vu lors d’une représentation destinée aux professionnels au CDN Orléans / Centre-Val de Loire.
Tournée à venir : Du 6 au 25 juillet 2021 La Manufacture, Avignon – 1 et 2 décembre 2021 Halle aux grains, Scène Nationale de Blois

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