Laurent Leclerc adapte très librement en la développant la très courte nouvelle Aux Champs de Maupassant. Deux familles pauvres mais heureuses vivent dans l’entraide et l’amitié jusqu’au jour où un couple de bourgeois riche mais stérile arrive et propose à chacune des familles d’acheter leur enfant pour l’adopter. La première refuse tandis que la seconde accepte. Sauf qu’ici le couple riche n’adopte pas un très jeune enfant de paysans normands mais une jeune gitane adolescente. Comme chez Maupassant, il s’agit de montrer l’opposition ente deux milieux sociaux, deux cultures et le pouvoir dramatique de l’argent roi. Mais le parti pris de faire adopter une adolescente change la donne car s’y ajoutent le point de vue fougueux et rebelle de Juanita – Jeanne, la jeune fille adoptée, le flamenco et le chant lyrique comme éléments scénographiques dont le but est de renforcer par ces deux arts le jeu théâtral de la dénonciation sociale portée par la nouvelle.

Les différentes phases du récit se déroulent dans une forme de fondus enchaînés sur un parquet installé au milieu des spectateurs disposés en triptyque, témoins emportés dans ce tableau de misère sociale. Toute la force réside dans l’exécution dansée et chantée des émotions qui colorent vivement les dialogues tendus entre les personnages dont les cris et les invectives se croisent et parfois se confondent. Il faut souligner les excellentes danses flamencas de Karine Herrou Gonzalez (Carmen incroyable) et de Nati James (Maria en colère) accompagnées à la guitare par l’excellent François Aria en alternance avec Paul Buttin et Cristobal Corbel et Isodoro Fernandez Roman (le manouche) à la caisse claire ; Louise Leclerc en Juanita, adolescente écorchée dont les mots / maux peinent à se faire entendre ; Magali Palies en Mathilde séduit par son chant lyrique et sa très belle voix flanquée d’un mari peu scrupuleux (Bastien Spiteri) qui pense que tout s’achète pour apaiser sa femme en manque d’enfant. Le parti pris fonctionne et devrait gagner en puissance si quelques positionnements d’acteurs et de jeu étaient affinés.

Frédérique Moujart

Jusqu’au 25 mai du mercredi au samedi à 20h30 et le dimanche à 17h – Théâtre de l’Opprimé, 78 rue du Charolais, Paris 12ème -Réservations : communication@theatredelopprime.com


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