Le théâtre ne peut pas changer le monde qui en aurait bien besoin. Ce n’est pas sa vocation mais celle de la politique, au vrai sens du terme. Cependant, le théâtre peut nourrir et parfois modifier notre vision du monde. Le Festival, c’est 22 jours de théâtre, 42 spectacles et près de 300 représentations incluant spectacles, rencontres, lectures, débats, un Café des idées et des projections. C’est aussi 32 créations 2025 (73% de la programmation) dont 20 créations au Festival. Durant trois semaines de juillet, à Avignon, le théâtre se fait monde et le monde se fait théâtre. Si on estime que cela ne peut pas faire bouger des opinions alors pas la peine de venir au Festival d’Avignon !

Si on y vient ce peut être sans séjourner sur place, en train et à la journée… En effet, depuis l’an dernier, la Région Sud met en place des TER supplémentaires et les horaires au départ de la gare d’Avignon Centre, sont étendus en soirée (jusqu’à 23h30) pour une dizaine de villes alentours dont Carpentras, Orange, Cavaillon, Arles, etc. Deux dernières données chiffrées : plus de la moitié des artistes sont invités pour la première fois au Festival d’Avignon et les artistes présents le seront dans une stricte parité.

Pour cette édition qui précède l’anniversaire des 80 ans du Festival, la langue invitée est l’arabe, une langue avant tout poétique et littéraire, sans compromission avec ses récupérations idéologiques. Le 15 juillet, en collaboration avec l’Institut du monde arabe, La soirée Nour mettra en « lumière » la poésie de langue arabe dans la Cour du Lycée Saint-Joseph. La veille, dans la Cour d’Honneur du Palais des Papes, plusieurs chanteuses dont Camélia Jordana célébreront les 50 ans de la disparition de l’Astre d’Orient, la chanteuse Oum Kaltoum décédée en 1975. Est proposée également la reprise de TAIRE de la franco-irakienne Tamara Al Saadi ainsi que Magec du belgo-marocain Radouan Mriziga dont la chorégraphie explore le désert dans une relation au temps, à la lumière et au mouvement. Et d’autres choses encore…

Dans la suite du procès Pélicot et dans un bel élan féministe et progressiste, le Festival propose une soirée d’hommage à Gisèle Pélicot, le 18 juillet dans le Cloître des Carmes : « La honte doit changer de camp » et le Festival d’Avignon sait choisir le sien sous l’impulsion de son président, Tiago Rodrigues. Cet enfant de Lisbonne très vite adopté par la Cité des Papes, nous offrira la création de sa nouvelle pièce Distance à l’Autre Scène de Vedène, une scène périphérique associée au Festival. Sans évoquer la totalité du programme riche en genres, en thèmes et en sujets, citons encore le retour dans la Cour d’Honneur du Soulier de satin de Paul Claudel, presque quarante ans après la célèbre mise en scène d’Antoine Vitez. Cette fois, c’est la troupe de la Comédie Française qui portera cette pièce marathon dans une mise en scène d’Éric Ruf qui a déjà ébloui le public parisien.

Enfin, signalons l’ouverture le 5 juillet 2025 d’une exposition permanente et immersive à la Maison Jean Vilar sur l’histoire, le sens et les enjeux artistiques, culturels et sociaux du Festival. L’exposition intitulée Les Clés du Festival et dont le commissaire est Antoine de Baecque, rassemblera près de mille documents et archives de la Maison Jean Vilar et des collections de la Bibliothèque nationale de France, invitant ainsi le public à se plonger dans l’aventure d’Avignon de 1947 à nos jours.

Mais réservons les derniers mots à Tiago Rodrigues qui aime tant partager la parole : « ’’Je suis toi dans les mots’’ écrivait le poète palestinien Mahmoud Darwich. Cela pourrait être la devise du Festival d’Avignon, depuis près de huit décennies fulgurantes. Nous ne racontons pas seulement des histoires pour survivre, comme Shéhérazade dans les Mille et Une Nuits. Nous les racontons pour vivre ensemble, et apprendre à mieux le faire. Être ensemble, c’est se mélanger et bâtir une utopie éphémère mais bien réelle : celle d’être ensemble. Au Festival d’Avignon, la diversité est un trésor. Nous chérissons ce dialogue démocratique où, grâce à l’art, se confrontent différentes visions du monde. Cultivons cette curiosité pour l’avenir, réaffirmons l’élan de décentralisation, de démocratisation et d’exception culturelle amorcé après la Seconde Guerre mondiale. Dans un monde où les autoritarismes sèment la guerre, menacent les démocraties, nient l’urgence climatique et obscurcissent toute idée d’avenir, profitons de chaque instant passé ensemble pour imaginer de nouvelles voies. Le Festival d’Avignon est une scène où se réinvente en permanence l’avenir. Pendant un mois, pendant toute une vie, soyons libres et inventifs. Soyons l’autre dans les mots, car c’est la plus belle façon d’être pleinement nous-mêmes. Ensemble. »

Jean-Pierre Haddad

Festival d’Avignon 2025, 7 9e édition, Avignon 84000, Vaucluse – Du 5 et le 26 juillet 2025 

Plus d’informations et tout le programme en détail : https://festival-avignon.com/

Maison Jean Vilar, Place de L’Horloge (montée face à la Mairie d’Avignon) : https://maisonjeanvilar.org/


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