« Les évadés »

Tout démarre avec l’intervention du collectif Sauvons les riches lors de l’Assemblée Générale des actionnaires de Blue Télékom. Alors que les dirigeants s’octroient des hausses faramineuses de leur rémunération et annoncent que les actionnaires bénéficieront de dividendes conséquents tandis que les salariés recevront une augmentation royale de soixante-deux centimes, les activistes organisent un « concours de lancer de miettes ». Le collectif centre son action sur cette société suspectée de favoriser l’évasion fiscale. Parmi les personnalités soupçonnées se trouve Jacques Trompe, un candidat à l’élection présidentielle. Rosa, journaliste d’investigation se propose de couvrir l’événement, en dépit des réticences de son rédacteur en chef, qui préférerait qu’elle se consacre à des sujets plus glamour. Dans la confusion de la manifestation elle se trouve embarquée par la police qui la soupçonne d’être une meneuse du collectif.

Désireuse de traiter du sujet de l’évasion fiscale, qui menace nos démocraties en détournant des sommes indispensables à nos services d’éducation, de santé et de sécurité, Amélie Cornu a construit une fiction appuyée sur une recherche documentaire autour des conséquences de l’évasion fiscale et de l’activisme du collectif Sauvons les riches. Le public se réjouit de retrouver la réalité sous des noms dont quelques lettres ont été inversées, HVLM ou Patrick Kalbony par exemple, ou des slogans déjà entendus dans les manifestations. Comme dans une enquête, on suit des activistes imaginatifs, une journaliste qui croit au journalisme d’investigation et des policiers aux profils divers. C’est drôle, parfois burlesque, vivant et passionnant.

Les différents lieux de l’action apparaissent sous forme de dessins, un écran permet de projeter les images d’un journal télévisé ou de personnages interviewés. Le choix du noir et blanc dans la scénographie permet de donner la priorité à une fiction politique plutôt qu’à la sèche réalité. La mise en scène elle, plonge le public au cœur de l’action. Les activistes investissent la salle, lancent des billets à profusion et interpellent les spectateurs.

Une perruque, un changement de costume permettent aux six comédiens et comédiennes (Jean Barlerin, Amélie Cornu, Tristan Legoff, Aurélie Noblesse, Cindy Rodrigues et Hugo Sablic) d’incarner une vingtaine de personnages. Ils sont dynamiques, enthousiastes, drôles, convaincants pour nous rappeler l’importance du combat pour la justice fiscale. Une bataille d’autant plus indispensable à l’heure où les Musk et autres Bernard Arnaud défendent la liberté des riches à placer leur argent là où ils ne seront pas taxés et mènent le combat contre un État qu’ils accusent de les voler.

Micheline Rousselet

Jusqu’au 26 février au Théâtre de Belleville, 16 passage Piver, 75011 Paris – les lundis à 19h15, mardi et mercredi à 21h15, le dimanche à 17h – Réservations : 01 48 06 72 34 ou theatredebelleville.com