Le siège de Sarajevo, qui a duré près de quatre ans de 1992 à 1996, est en train de s’achever. Dans un orphelinat de la ville, huit ados ont appris à vivre ensemble en évitant de se laisser enfermer dans les différences ethniques ou religieuses. Formant une véritable meute avec ses rivalités, ses rapports de domination, ses amitiés et ses amours, ils se remémorent certains moments de la guerre, la mort de leurs parents, le premier bombardement, la peur des snipers, les balles traçantes comme des fusées de feu d’artifice. Maintenant que le conflit touche à sa fin, il va falloir apprendre à vivre sans la guerre, sans le bruit des bombes et la peur. Pourquoi ne pas construire un spectacle où ils pourraient se déguiser pour coller à leurs rêves et qui les aiderait à renouer avec la vie ?
Fabrice Melquiot a écrit ce texte en 2002 peu de temps après la fin de la guerre de Yougoslavie. On y reconnaît le talent du dramaturge, maintes fois primé, et dont les textes pour le jeune public ont marqué de nombreux élèves et étudiants. On y trouve le besoin d’amour et d’amitié résistant à la violence, un humour parfois un peu désespéré comme lorsqu’un nouveau arrive à l’orphelinat demandant aux kids « de partager avec eux les parents qu’ils n’ont plus » et une poésie qui lutte contre les horreurs de la guerre.
François Ha Van met en scène avec force ce texte, pour lequel il a obtenu le Prix de la presse Avignon-Off en 2021. Les jeunes arrivent des différents points de la salle comme pour se retrouver à certains moments à l’orphelinat, ou s’y égayent comme pour fuir les bombardements. Une grande toile devient abri ou ruines dont il faut s’échapper. Du frère aîné qui surjoue la violence au jeune frère à l’esprit dérangé (Hoël Le Corre particulièrement émouvant), du jeune couple où c’est la fille qui mène le jeu à la fille noyée dans ses complexes, les huit jeunes comédiens ont une vraie présence. Nathan Dugray, auteur de la partition musicale, les accompagne guitare électrique à la main. C’est un beau travail de troupe qu’ils proposent avec une énergie et une générosité formidables.
Micheline Rousselet
Jusqu’au 6 avril à La Scala, 13 bld de Strasbourg, 75010 Paris – vendredi et samedi à 19h30, le dimanche à 17h30 – Réservations : 01 40 03 44 30 ou https://lascala-paris.fr
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