Cela fait six ans que Vincent Macaigne n’avait plus réalisé de mises en scène de théâtre. Il y revient avec ce spectacle d’après « Shakespeare et autres textes », dit le programme, en l’occurrence Richard III de Shakespeare, mais aussi ses propres textes et Nietzsche et Heiner Müller. Ce prince, mal aimé et maltraité par sa mère et ses frères, assassine autour de lui tous ceux qui auraient droit à lui contester l’accès au titre de Roi. Il y est aidé par Georges, un courtisan opportuniste maniant la flatterie et le mensonge. Le metteur en scène trouve des échos à cette histoire dans la violence de nos sociétés, marquées elles aussi par le mensonge et la propagande.
Bien qu’entouré par une pléiade de très bons acteurs (Sharif Andoura, Max Baissette de Malglaive, Candice Bouchet, Thibault Lacroix, Clara Lama Schmit, Pauline Lorillard, Pascal Rénéric et Sofia Teillet), le metteur en scène fait, de ce qui fut il y a quinze ans son originalité, une lourde caricature.
Les acteurs hurlent en permanence, ils lancent des appels au public censés faire rire (un vote en se serrant la main, une fois pour « oui », deux fois pour « non »), ils grimpent dans la salle pour interpeller les spectateurs. On peut y ajouter des interventions musicales assourdissantes, des fumigènes, des centaines de litres de boue et de merde qui se déversent sur le plateau, des vidéos en cascades d’accidents spectaculaires, un maximum de bruit qui commence dès le hall d’entrée du théâtre et, comme s’il n’y en avait pas assez, un chariot de supermarché dévalant du haut des gradins. Tout cela pour quoi ? Ce ne sont pas les clins d’œil à l’actualité (Trump, les fake news, les meetings des populistes) et les quelques tirades rescapées de Shakespeare qui sauvent le spectacle. S’agit-il pour Vincent Macaigne de réaliser une performance ou de créer dans le public une émotion qui s’imprimera en lui ? Pour cela il faudrait un peu plus de sens, au-delà du burlesque et du spectaculaire. Or on sort de la salle hésitant plutôt entre agacement et consternation.
Micheline Rousselet
Jusqu’au 15 octobre à la MC 93, Maison de la Culture de Seine Saint-Denis, 9 boulevard Lénine, 93000 Bobigny – du mardi au vendredi à 20h, le samedi à 18h, le dimanche à 16h – Réservations : 01 41 60 72 72 ou mc93.com – en tournée ensuite : du 7 au 9 novembre au Tandem Scène nationale Douai-Arras, 16 et 17 novembre à Bonlieu-Scène nationale d’Annecy, du 22 au 25 novembre au Théâtre National de Bretagne à Rennes, les 11 et 12 avril 2024 au Quartz-Scène nationale de Brest, du 16 au 23 mai aux Célestins à Lyon, d’autres dates encore en 2024.
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